Bibliothèque de droit social - Tome 61 - La notion de groupe d'entreprises en droit du travail - 154

138

LA NOTION DE GROUPE D'ENTREPRISES EN DROIT DU TRAVAIL

i.	 Une conception restrictive du contrôle : le critère de la détention en capital
375.  La version initiale de l'ancien article L. 439-1 du Code du travail renvoie
expressément au droit des sociétés, et plus précisément à l'article 354 de la loi n° 66-537
du 24  juillet  196611. L'article  354 de la loi du 24  juillet  196612 définit la relation de
filialisation entre une société mère et une filiale par la détention en capital  : «  Lorsqu'une
société possède plus de la moitié du capital d'une autre société, la seconde est considérée,
pour l'application du présent chapitre, comme la filiale de la première ». Par référence à
cette disposition, l'entreprise dominante de l'article L. 439-1 du Code du travail est la
société mère telle que définie à l'article 354 de la loi du 24 juillet 1966. L'existence d'un
rapport de filialisation entre sociétés entraîne l'inclusion automatique des filiales dans
le périmètre du groupe. « La constitution d'un comité de groupe sur la base de rapports
de filiation entre sociétés est de droit. Elle ne nécessite aucune demande »13. La prise en
compte des relations de filialisation par renvoi au Code de commerce reflète incontestablement l'influence du droit des sociétés sur la définition légale du groupe. Elle
représente « un point de rencontre entre les différentes définitions sociétaire, comptable
et celle relevant du droit de l'autocontrôle des sociétés commerciales »14 et inscrit les
relations inter-entreprises de groupe sous le signe de la domination. La notion d'entreprise dominante demeure toutefois plus large que celle de société mère, puisqu'elle
désigne aussi la société qui détient indirectement la majorité du capital d'une sousfiliale, par l'intermédiaire d'une de ses filiales, à la condition qu'il n'y ait pas de rupture dans le contrôle15. « Cette terminologie de filiale indirecte demeure l'apanage de la
législation sociale même si les praticiens des affaires l'utilisent parfois »16 et contribue à
privilégier une conception large des rapports de domination de groupe.

ii.	 L'évolution vers une conception plus extensive du contrôle
376. Malgré la volonté affichée du législateur de 1982 d'entendre largement la
relation de contrôle, la définition légale du groupe n'a pas suivi l'évolution de la notion
de contrôle, au point de paraître en retrait17. Cette carence du législateur a été soulignée à plusieurs reprises par la doctrine18. Il faut attendre la loi du 12 novembre 1996
pour enrichir la notion de contrôle. L'ancien article L. 439-1 II du Code du travail19
est introduit et rédigé de cette manière : « un comité de groupe est constitué au sein du
groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle
11. Article L. 439-1, al. 1 (loi du 28 octobre 1982) : « Un comité de groupe est constitué au sein du
groupe formé par une société appelée, pour l'application du présent chapitre, société dominante, les
filiales de celle-ci, au sens de l'article 354 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 modifiée, et les sociétés
dont la société dominante détient indirectement plus de la moitié du capital, dont le siège social est situé
sur le territoire français ».
12. L'article 354 de la loi du 24 juillet 1966 est codifié à l'article L. 233-1 du Code de commerce.
13. M. Cohen, « La constitution et le fonctionnement des comités de groupe », RPDS 1983, p. 280.
14. D. Plantamp, « L'originalité du groupe de sociétés au sens de l'article L. 439-1 du code du
travail », article. précité, p. 70.
15. Circ. DRT n° 6, 28 juin 1984, Dr. Ouvr. 1984, p. 374.
16. D. Plantamp, « L'originalité du groupe de sociétés au sens de l'article L. 439-1 du code du
travail », article. précité, p. 70.
17. Prise en compte notamment de la puissance de vote par la loi n° 85-11 du 3 janvier 1985
relative aux comptes consolidés de certaines sociétés commerciales et entreprises publiques.
18. D. Plantamp, « L'originalité du groupe de sociétés au sens de l'article L. 439-1 du code du
travail », article. précité, p.  71 : « La conception de la participation au capital proposée par l'article L. 439-1 avait déjà été jugée « peu audacieuse ». Elle l'est d'autant moins lorsqu'on la compare à la
détention des droits de vote, qui, elle, correspond à un pouvoir réellement exercé plutôt qu'à un simple
rapport de propriété ». P. Langlois, « L'originalité de la prise en considération des groupes de sociétés
en droit du travail, Travail et Protection Sociale 1999, p. 7.
19. Ancien article L. 439-1, II devenu l'article L. 2331-1, I du Code du travail.

These Kocker CA3.indd 138

6/20/2013 11:02:29 AM
Bibliothèque de droit social - Tome 61 - La notion de groupe d'entreprises en droit du travail

Table des matières de la publication Bibliothèque de droit social - Tome 61 - La notion de groupe d'entreprises en droit du travail
