Bibliothèque de droit social - Tome 61 - La notion de groupe d'entreprises en droit du travail - 182

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LA NOTION DE GROUPE D'ENTREPRISES EN DROIT DU TRAVAIL

a)	 L'intérêt de la notion de secteur d'activité
469. Le critère du secteur d'activité apparaît mieux adapté à l'appréciation de la
réalité du motif économique du licenciement que la permutation du personnel148. Il
favorise également une analyse plus fine de la réalité des difficultés économiques éventuellement rencontrées par un groupe, tout en évitant les effets pervers d'un cadre
d'appréciation trop vaste, comprenant l'ensemble du groupe toutes activités confondues. Car, « l'admission d'un périmètre de groupe trop vaste revient à refuser le licenciement pour une partie du groupe qui connaît des difficultés économiques avérées. Or, ce
refus peut avoir pour conséquence de faire peser sur le reste de l'ensemble groupé ces
difficultés qui peuvent ainsi provoquer de nouveaux embarras à des parties du groupe qui,
jusqu'alors, connaissaient une situation saine. Ces difficultés pourront nécessiter à leur
tour des licenciements qui toucheront un plus grand nombre de travailleurs »149. En limitant ainsi le contrôle des difficultés économiques au secteur d'activité, la Cour de
cassation garantit la survie économique de l'ensemble du groupe tout en évitant les
abus liés à des licenciements économiques de confort. Le groupe est en effet responsabilisé à l'échelle du secteur d'activité par un jeu de « compensation des contraintes »150.
470. D'un côté, la Cour de cassation reconnaît l'intérêt pour les groupes de diversifier leurs secteurs d'activité afin de mieux s'adapter aux fluctuations du marché et, en
cas de difficultés de l'un d'eux, elle leur reconnaît la possibilité de réagir par des restructurations ou des licenciements pour motif économique au niveau du secteur ; de l'autre,
elle neutralise la stratégie de limitation des risques de certains groupes, consistant à procéder à des licenciements dans une entreprise du groupe en difficultés alors que le secteur d'activité du groupe est globalement bénéficiaire. Une certaine « solidarité »151 s'instaure entre les entreprises d'un groupe appartenant à un même secteur d'activité. Les
contraintes qui pèsent sur l'employeur peuvent être « compensées » au niveau du secteur
d'activité par les résultats positifs des autres entreprises du groupe d'un même secteur
d'activité. L'appréciation de la situation économique de l'entreprise peut difficilement se
passer d'une analyse de la situation économique du groupe152. En réalité, la « compensation des contraintes » mise en place au niveau du secteur d'activité suit un raisonnement
similaire à celui applicable au sein d'une entreprise isolée. Selon une jurisprudence
constante, les difficultés économiques ne s'apprécient pas au niveau de l'établissement
mais au niveau de l'entreprise153. De même, l'entreprise qui n'appartient pas à un groupe
ne peut se prévaloir des difficultés économiques de l'un de ses secteurs d'activité pour
148. G.  Couturier, « L'extinction des relations de travail dans les groupes de sociétés », in
B. Teyssié (dir.), Les groupes de sociétés et le droit du travail, op. cit., p. 83. Le secteur d'activité « permet ainsi une appréciation plus efficace du motif économique, dans la mesure où la solution aboutit à la
subdivision du groupe selon les secteurs d'activité qui le composent ».
149. C. Morin, Le groupe des sociétés au regard du droit social, op. cit., p. 231.
150. P.  Kontogeorpoulou, La conception juridique de l'emploi comme risque. Réflexions à la
lumière du licenciement pour motif économique, Thèse, Paris X Nanterre 2000, p. 237.
151. K. Adom, « Problématique des nouvelles orientations sur le licenciement économique dans
les groupes de sociétés », LPA 1er sept. 1995, n° 105, p. 11.
152. En ce sens : P. Waquet, « Le niveau d'appréciation des conditions du licenciement économique », Dr. soc. 1995, p. 482 : « la prospérité de l'entreprise dépend, pour une large part, des décisions
du groupe qui peut, aisément, appauvrir ou favoriser, selon les cas, une filiale. La situation économique de
celle-ci n'est donc qu'un élément d'appréciation qui ne peut se distinguer d'une vision d'ensemble. Les
grandes décisions sont prises au niveau du groupe ». Également : G. Lyon-Caen, « Sur le transfert des
emplois dans les groupes multinationaux », Dr. soc. 1995, p. 493 : « Un groupe peut être globalement
prospère, certaines activités étant exposées à des menaces alors que d'autres gagnent de l'argent »
153. Cass.  soc., 17  juin 1992, n°  89-42769, Bull.  civ.  V, n°  403 ; Cass.  soc.  16  octobre 1997,
n° 95-41378, RJS 97, n° 1349 ; Cass. soc. 24 février 1993, n° 90-40403, Dr. soc. 1993, n° 4, p. 387 ;
Cass. soc., 26 juin 2012, n° 11-13736, publié.

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