Contextes - Histoire des manuels de droit - 105

LeS uSAGeS De L'HiStoiRe et Du DRoit RomAin

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A. L'histoire, discipline auxiliaire... voire accessoire
Que le XIXe siècle soit le siècle de l'histoire a pris valeur d'assertion38.
L'histoire du droit en particulier, gagne indéniablement en importance dans
la seconde moitié du XIXe siècle, notamment sur un plan institutionnel39. et
pourtant, on observe tout au long de la période retenue, la volonté affichée
de plusieurs auteurs de manuels d'introduction au droit de cantonner l'histoire au rang de discipline auxiliaire voire accessoire.
Durant la première partie du XIXe siècle, avant donc que l'histoire du
droit n'obtienne quelque reconnaissance, maintenir l'histoire dans un statut
ancillaire apparaît très clairement dans certains manuels. C'est le cas du
manuel d'introduction au droit d'un professeur dijonnais William Belime
(1811-1844). Cet auteur qui occupa la chaire de droit romain et qui avait le
projet d'écrire une histoire du droit français, est sans nul doute un partisan
de l'histoire. D'ailleurs dans la préface de son ouvrage paru en 1844, il écrit
sans ambiguïté : « la philosophie et l'histoire sont les deux avenues de la
jurisprudence » et précise : « l'histoire déroule devant nous les vicissitudes
des institutions ; elle nous en révèle l'origine, les progrès et la décadence ;
elle nous apprend les causes qui les font prospérer, les vices secrets qui les
font dépérir. Elle est à la philosophie ce que l'expérience qui éclaire est à
la raison qui juge »40. en parcourant l'ouvrage, on constate que l'auteur
réitère cette nécessité de faire grand cas de l'histoire, et ce, avant même le
droit comparé et la statistique écrit-il41.
toutefois, dans un passage où il livre sa vision négative de l'école historique allemande, il affirme : « il faut accepter l'histoire comme auxiliaire ;
mais il faut réserver la part principale à la raison, qui seule perçoit et
généralise les résultats. Tel est le système qui paraît celui du sens commun,
38. il faut citer ici le travail classique de Carbonell (Ch.-O.), Histoire et Historiens : une
mutation idéologique des historiens français 1865-1885, toulouse, Privat, 1976, notamment
les pages 71-90 où l'auteur étudie la pertinence de qualifier le xixe siècle de siècle de l'histoire
(il choisit la date de 1865 comme point de départ de la consécration de l'histoire, p. 88). Pour
une relecture critique du schéma traditionnel qui fit florès, selon lequel une mutation de
la vision de l'histoire serait intervenue en 1929, cf. Mucchielli (L. ), « Aux origines de la
nouvelle histoire en France : l'évolution intellectuelle et la formation du champ des sciences
sociales (1880-1930) », Revue de synthèse, 1, janvier-mars 1995, p. 55-87.
39. Sur l'institutionnalisation laborieuse de l'histoire du droit au xixe siècle, cf. Poumarède
(J.), « Pavane pour une histoire du droit défunte (sur un centenaire oublié), Procès. Cahiers
d'analyse politique et juridique, 6, 1980, p. 91-102 ; Halpérin (J.-L.), « L'histoire du droit
constituée en discipline : consécration ou repli identitaire ? », Revue d'histoire des sciences
humaines, 4, 2001, p. 9-32 et plus généralement les contributions de l'ouvrage Histoire de
l'histoire du droit, Poumarède (J.) (dir.), toulouse, Presses de l'université de toulouse i,
2006.
40. W. Belime, Philosophie du droit ou Cours d'introduction à la science du droit, Paris,
Joubert, 1844, p. 5.
41. Ibid., p. 252.

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