Anthologie du droit - Méthode d'interprétation et sources en droit privé positif - Tome 1 - 258

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MÉTHODE D'INTERPRÉTATION ET SOURCES EN DROIT PRIVÉ POSITIF

tous moyens abandonnés à sa conscience, sans être entravée, ni par les formes, ni
par les délais, imposés à la démonstration, en justice, des faits proprement dits363.
Très généralement adoptées aujourd'hui par la doctrine allemande364, consacrées positivement par l'art. 265 du Code de procédure civile allemand du 30 janvier 1877, que reproduit l'art. 298 du même Code, révisé par la loi du 17 mai
1898365, ces vues, fort judicieuses, me paraîtraient, en l'absence de toute disposition légale sur la question, devoir, sans conteste, s'imposer en France366.
119. La question de preuve tranchée, il s'agit maintenant, - et c'est un point
capital à fixer pour nous rendre compte de la vie actuelle du droit coutumier, -
de déterminer les conditions, que suppose la coutume, pour s'imposer au jurisconsulte, à titre de source formelle du droit positif367. Dans cette recherche, nous
devons nous appuyer sur le fondement reconnu à la puissance de la coutume (cidessus, n° 116), et dégager son essence des nécessités sociales, qui, seules, la justifient et en peuvent préciser la portée. Or, ces nécessités sociales agissent ici en un
double sens. D'un côté, elles nous suggèrent les éléments, qui constituent, proprement et substantiellement, la coutume juridique. De l'autre, à nous supposer en
présence d'une coutume ainsi caractérisée, des raisons supérieures interviendront
peut-être, pour en paralyser la force et l'empêcher de valoir comme source de
droit368. En d'autres termes, on conçoit, à côté des conditions propres et positives
de la coutume, d'autres conditions, en quelque façon négatives, c'est-à-dire formant empêchement à l'efficacité du droit coutumier. Et, la différence pratique,
qui sépare les unes des autres, se présentera, notamment, au point de vue de la
preuve à faire, en ce sens que, - dans la mesure où la preuve de la coutume
échappe à l'office spontané du juge, et incombe aux parties intéressées (voy.
363. Savigny, Traité de droit romain, trad. Guenoux, t. I, 1840, p. 185. - O. Gierke, Deutsches
Privatrecht, § 20, texte et note 14, t. I, 1895, p. 175.
364. Voy. les références des deux notes qui précèdent.
365. Ce texte, qui vise, en même temps que la coutume, les lois étrangères et les droits locaux,
soumis au juge, est inspiré par des considérations essentiellement pratiques : « Das in einem anderen
Staate geltende Recht, die Gewohnheitsrechte und Statuten bedürfen des Beweises nur insofern, als sie
dem Gericht unbekannt sind. Bei Ermittelung dieser Rechtsnormen ist das Gericht auf die von den
Parteien beigebrachten Nachweise nicht beschrânkt ; es ist befugt anch andere Erkenntniszquellen zu
benutzen und zum Zwecke einer solchen Benutzung das Erforderliche anzuordnen ».
366. Par suite, j'écarterais l'idée, très répandue aussi chez nous, que le juge ne pourrait appliquer
une coutume, d'après la connaissance personnelle, qu'il en aurait. [Comp. M. Lefebvre, La coutume
comme source formelle de droit, thèse de doct. Droit, Lille, 1905-1906, p. 78-79.] Bien plus, j'admettrais
qu'il peut l'appliquer d'office, à moins que la partie, qui pouvait la faire valoir, ne soit présumée y avoir
renoncé, quand d'ailleurs la renonciation est possible. - Contra, sur ces deux points : Lyon-Caen et
Renault, Traité de droit commercial, t. I3. 1898. p. 80-81. - Baudry-Lacantinerie et HouquesFoucarde, Des personnes, t. I, 1896, n° 26, p. 20-21 ; - et, sur le premier : Dalloz, Suppl. au Rép., ve
Lois, n° 49. [ - Comp., en notre sens, sur la question principale traitée en ce paragraphe (n° 118) :
N. M. Korkounov, Cours de théorie générale du droit, trad. Tchernoff, Paris, Giard et Brière, 1903,
p. 443-446 (§ 51). - Et, voy. aussi, du point de vue de la nouvelle législation civile delà Suisse :
M. Gmür, Die Anwendung des Rechts nach Art. 1 des schweizerischen Zivilgesetzbuches, Bern, Stämpfli
et Cie, 1908, § 5, V, 3, p. 98-99.]
367. [D'après L. Duguit, la coutume - aussi bien d'ailleurs que la loi - n'est pas tant une
source créatrice, qu'un simple mode de constatation du droit : L'État, le droit objectif et la loi positive,
Paris, 1901, p. 557-569. Traité de droit constitutionnel, t. I, Paris, 1911, p. 55-56 (§ 17). Adde p. 139
(§ 35) et p. 148 (§ 36). - Comp. P. Vander Eycken, Méthode positive de. l'interprétation juridique,
Bruxelles et Paris, 1907, p. 17 (n° 1), et passim. - Ce point de vue peut être accepté, sans qu'il en
résulte un changement dans les bases essentielles du problème.]
368. J'emprunte l'idée de cette distinction à Puchta, Pandekten, §§ 12-13, 12e éd. Th. Schirmer,
1877. p. 21-24.
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