Anthologie du droit - Méthode d'interprétation et sources en droit privé positif - Tome 1 - 301

LES SOURCES FORMELLES DU DROIT PRIVÉ POSITIF ET LEUR INTERPRÉTATION

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nos 18 et 114), qu'en matière civile, du moins, ces usages ne s'imposeraient à l'interprète, qu'en vertu d'une décision propre de la loi, si, par une heureuse fortune,
les dispositions très générales des art. 1135, 1159, 1160 C.civ, franç., écrites pour
les contrats, mais étendues sans conteste, par analogie, à tous actes juridiques, ne
permettaient, pour l'interprétation et le développement de ceux-ci, de tenir très
largement compte de cette variété d'usages613.
Aux yeux de certains jurisconsultes français, même, il semble que les usages
conventionnels constitueraient le tout de la coutume juridiquement reconnue,
notamment en matière commerciale. Tel me paraît être, entre autres, le point de
vue de Ch. Lyon-Caen et L. Renault, qui font reposer toute la force obligatoire
des usages (équivalant pour eux à la coutume), sur l'idée d'une convention
tacite614, et qui n'hésitent pas à déduire les conséquences logiques de cette idée,
pour déterminer la portée de cette force obligatoire615.
Récemment, toutefois, un nouveau maître en droit commercial, Edm.
Thaller, a su très nettement spécifier ce qu'il appelle proprement les Usages
« manière tacite dont les parties ont entendu régler leur accord, telle qu'elle
résulte d'une pratique démontrée », pour les opposer à la Coutume « règle de
tradition tirant son autorité d'une pratique immémoriale, considérée comme loi
des ancêtres »616. Seulement, et si je comprends bien Edm. Thaller, cette distinction lui sert principalement à n'admettre, à côté de la loi, comme source du
droit commercial, que les usages proprement dits, et à exclure, du moins par
prétérition, la coutume elle-même617.
Au point où nous en sommes, cette dernière conclusion ne saurait nous
paraître admissible. Tous les développements, donnés en cette section de mon
travail, l'ont, par avance, réfutée. Voici donc quel peut être seulement, à mon
sens, le terrain de notre recherche actuelle. Partant du principe, acquis en vertu
des explications antérieures, de la valeur certaine de la coutume, comme source
formelle de droit positif, nous avons simplement à nous demander, si les Usages
conventionnels offrent exactement les caractères de la coutume juridique, telle
613. Rappr. les nombreuses dispositions analogues de législations diverses, que signale
Goldschmidt, Handbuch des Handelsrechts, § 35, note 30, t. I2, p. 335.
614. Traité de droit commercial, t. I3, 1898. p. 82, in fine. Aussi Lyon-Caen et Renault repoussentils toute coutume impérative. C'est ainsi, qu'ils refusent d'attribuer ce caractère à l'usage de la publicité des cessions de fonds de commerce, dans l'intérêt des créanciers du vendeur, et pour permettre à
ceux-ci opposition sur le prix (ci-dessus n° 111, p. 327, texte et note 1). Ils n'attribuent à cet usage que
la force d'une convention, devant être librement acceptée, au moins tacitement, des parties, cédant et
cessionnaire. Traité de droit commercial, t. III3, 1899, n° 251 bis, p. 189-190. - Contra : les mêmes,
dans Précis de droit commercial, n° 686, in fine, t. I, 1884, p. 370. - Boistel, Cours de droit commercial,
4e éd., 1890, n° 432, p. 296. - G. Olivier, Des cessions volontaires et à titre onéreux de fonds de commerce, thèse de doctorat. Droit, Dijon, 1898-1899, p. 138-142.
615. Traité de droit commercial, t. I3, p. 83-84. - Je note pourtant que Lyon-Caen et Renault
ont su, après Goldschmidt, séparer l'usage coutumier du simple usage de fait, p. 78 texte et note 4.
616. Traité élémentaire de droit commercial, 1898, n° 43, p. 42. [La distinction est encore plus
nette dans la 4e éd., 1910, n° 49, p. 41-43. Id. dans 5e éd., (J. Percerou), 1916, p. 42 44.] - Cpr. Massé,
op. et loc. supra citt.
617. C'est ce qui résulte, pour moi, de la lecture attentive des nos 40-46 du Traité élémentaire,
précité, p. 41-45 [5e éd., 1916, nos 49-51, p. 42-45.] - Voy. aussi Masse, op. et loc. citt.] - D'après
E. Thaller, Traité élémentaire de droit commercial, 5e éd. (J. Percerou), 1916, p. 44 (n° 49), l'usage
aurait force de convention, non de loi. Et. son caractère obligatoire s'expliquerait à titre de présomption de fait, ce mode de preuve étant plus aisément admis en droit commercial qu'en droit civil
(art. 1341 et 1353 C. civ. ; art. 109 C. com. franç.).]
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