Anthologie du droit - Méthode d'interprétation et sources en droit privé positif - Tome 1 - 45

RECONNAISSANCE ET INTERPRÉTATION DES SOURCES

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douteuse, l'assentiment de tous sur certains points déterminés, ne peut avoir cette
vertu, ni de créer le droit, en suppléant à la loi, ni d'abroger celle-ci en tout ou en
partie29. Ainsi, en dehors des anciennes coutumes, que le droit nouveau aurait, en
quelque sorte, consolidées, en leur maintenant force et vigueur, ou de celles auxquelles nos lois renvoient positivement, on dénie toute valeur juridique aux usages,
aux traditions, à plus forte raison, aux autorités et aux précédents, dont on veut
bien tenir compte, à titre consultatif et pour la direction pratique, mais non dans
la dogmatique propre du droit30. - Toutefois, ce dédain de la coutume a rencontré, dans un petit nombre de commentateurs, des adversaires autorisés31. Et,
récemment encore, Ch. Beudant nous montrait, par des exemples pris sur le vif,
la vanité d'une opinion, qui, méconnaissant la force créatrice de cette source primordiale du droit, se heurtait, en dépit des efforts de sa dialectique, à une pratique
impérieuse et indispensable32. Réserve faite de ces dissidences, l'opinion la plus
répandue répugne décidément à admettre, dans notre état actuel de civilisation,
l'autorité d'un droit non écrit basé sur les usages33.
19. Les tendances de notre dogmatique ne sont pas sensiblement différentes,
relativement à la question de savoir si l'équité, issue de principes généraux préexistants et supérieurs à la loi, ne peut pas compléter celle-ci. À ce point, pourtant, la
question devient pressante. Car, supposez que se présentent des cas non aperçus
par le législateur, et qui ne puissent rentrer dans aucun des cadres qu'il a définis,
si élastiques qu'on les imagine, si largement qu'on les veuille ouvrir. C'est là une
hypothèse rare, sans doute, aux yeux des juristes modernes, mais que pourtant ils
29. Dissertation insérée au Sir. 1809-2, p. 376-380. - Demolombe, t. I, nos 32-35 et 130. -
Aubry et Rau, §§ 23 et 29, t. I5, p. 75-76 et 96-97. - F. Laurent, Avant-projet de révision du Code civil,
sur l'art. 28, n° 5, t. I du Commentaire, 1882, p. 171-172. Adde, p. 199, nos 1 et 4. - Huc, Commentaire
du code civil, t. I, nos 49-51, p. 58-60. - Moreau, Précis élémentaire de droit constitutionnel, 2e édit.,
n° 295, p. 261. - Dalloz, qui, dans son Répertoire, v° Lois, n° 113, avait admis le pouvoir de la Coutume, à l'effet de suppléer la loi, est revenu sur cette opinion, sous la pression du mouvement scientifique contraire, dans son Supplément au Rép., v° Lois, n° 46. - Comp., sur la question de savoir si la
loi perd son effet par la cessation de l'état de choses, qui l'a motivée : Demolombe, t. I, n° 129. -
Aubry et Rau, § 29, texte et note 3, § 40, texte et note 4, t. I5, p. 97 et 195. - Dalloz, Rép. V° Lois,
nos 545-548. Suppl, eod. v°, n° 454. [- La doctrine italienne paraît moins exclusive. Voy par exemple :
A. Scialoja, Sulla teoria della interpretazione delle legi. Nota. Torino, 1898, p. 4].
30. Aubry et Rau, § 39 bis, in fine, texte et note 11, t. I5, p. 192. - Cpr. Laurent, Principes de
droit civil, t. I, 1869, nos 280-281, p. 357-360. - Avant-projet de révision du Code civil, t. I du Commentaire, p. 172. [- Comp., avec quelques tempéraments : A. Colin et H. Capitant, Cours élémentaire de droit civil français, t. I, Paris, Dalloz, 1914, p. 27-29. - Voy. aussi : P. Perrenet, La Coutume et le Code civil, dans Revue critique de législation et de jurisprudence, 1906, t. 55. nouv. série,
t. XXXV, p. 366-376].
31. Notamment Demante, Cours analytique. Introduction, nos 20 et 30, t. I, p. 11 et 15.
- A. Boistel, Cours de philosophie du droit, 1899, n° 518, t. II, p. 413-415. - Les premiers commentateurs s'étaient montrés plutôt favorables à la Coutume. Voy. notamment : Merlin, Rép., v° Usage.
- Toullier, Le droit civil français, t. I5, 1839, n° 158-165, p. 125-130. - Mailher de Chassat, Traité
de l'interprétation des lois, 1822, §§ CXLI-CLV, p. 231-255. - Duranton, Cours de droit français, t. I4,
1844, nos 100-102 et 107-108. - A. Trolley, Cours de droit administ., t. I, 1844, n° 14. -
Comp. Làurent, Principes de dr. civil, t. I, nos 256-257, p. 329-330.
32. Cours de droit civil français, Introduction, 1896, nos 54-56, p. 51-65 et n° 105, p. 110-110.
[- Comp. M. Planiol, Traité élémentaire de droit civil, 6e éd., t. I, Paris, 1911, nos 11, 13, 14, p. 4-6. -
H. Capitant, Introduction à l'étude du droit civil, 3e éd., Paris, A. Pedone, 1912, p. 23-27].
33. Voy. encore, très nettement, en ce sens : Baudry-Lacantinerie et Houques-Fourcade,
op. cit., nos 17-27 et 123-124, t. I, 1896, p. 16-21 et 84-86. [- Alias, à partir de la 2e édition, t. I, 1902,
p. 20-21 (n° 20), p. 97-98, (n° 123). - Adde, contre le pouvoir créateur de la Coutume juridique (de
lege ferenda), à l'époque actuelle : A. Esmein, La Coutume doit-elle être reconnue comme source de
droit civil français ? dans Bulletin de la Société d'études législatives, 1905, t. IV, p. 533-544].
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