Droit et économie - Droit et économie de la propriété intellectuelle - 71

La propriété intellectuelle au cœur de l'économie de l'immatériel

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l'industrie. Or, habituellement, ce qui relève de l'exception s'interprète strictement : « exceptio est strictissimae interpretationis ».
Les magistrats ont été amenés, à de nombreuses reprises, à considérer ce
rapport d'une restriction de la liberté à la liberté en matière de droit des marques76.
Cela a conduit la jurisprudence à utiliser la fonction de la marque, à revenir à
son essence commerciale qui postule un usage dans la vue des affaires, pour que
celle-ci puisse être opposée à des tiers. Cette confrontation, imprégnée de l'idée
de juste équilibre, de proportionnalité, met ainsi en lumière l'idée de fonction
des droits de propriété intellectuelle.
La question de la juste mesure des droits de propriété intellectuelle dans l'économie de l'immatériel évoque immanquablement celles de la fonction des droits
de propriété intellectuelle et de l'abus dans leur exercice ou plus généralement
dans l'utilisation de la propriété intellectuelle comme stratégie.
Un rapport préliminaire de la Commission européenne relatif au secteur de
l'industrie pharmaceutique a été, à cet égard (celui de l'abus), assez éclairant
(même s'il faut préciser qu'il a été très largement contesté par certains laboratoires
pharmaceutiques)77.
Il s'intéresse à la diminution de l'innovation dans ce secteur, suspectée d'être
due à des entraves à la concurrence. En effet, sur une même période, le rapport
relève que le nombre de brevets déposés n'a cessé d'augmenter alors que le
nombre de nouvelles molécules lancées sur le marché diminuait. De même, la
Commission a été alertée par l'arrivée tardive des génériques sur le marché après
l'expiration des monopoles. Elle s'est donc interrogée sur les causes. L'étude a
porté sur des laboratoires innovants et des laboratoires de génériques. Ils représentent ensemble 80  % du chiffre d'affaires généré dans le secteur
pharmaceutique.
Ce rapport semble montrer que le brevet est une arme dans les mains des
laboratoires pour se préserver de la concurrence.
Les pratiques sont variées : au niveau du dépôt, les laboratoires déposeraient
de très nombreux brevets concernant la même molécule ; il s'agit dans 87 % des
cas de brevets secondaires sur des formulations ou formes particulières de la
molécule en question (brevets dérivés du principe actif initial ; brevets de formulation ; brevets de dosage, brevets de procédés, brevets de première application
thérapeutique et d'application thérapeutique ultérieure...).
De manière générale, le rapport relève :
76. V. notamment, E. Baud, « Contentieux du droit des marques, la libetté d'expression menace-t-elle le
monopole du titulaire de marque ? », in A. Abello, M-A. Frison-Roche (dir.), Droit et économie de la propriété
intellectuelle, LGDJ, 2005, p. 405 et s. V. aussi Cass. com., 8 avril 2008, n° 06-10961 ; Cass. 1re civ., 8 avril
2008, n° 07-11251.
77. Pour une analyse duquel, cf. J. Armengaud et E. Berthet-Maillols, « Du mauvais usage du droit
des brevets en matière pharmaceutique, selon le rapport préliminaire de la Commission européenne », Propriétés
intellectuelles, avril 2009, n° 31, p. 132 et s. Le rapport final a été rendu public le 8 juillet 2009 : European
Commission's final report on competition in the pharmaceutical sector: Pharmaceutical Sector Inquiry. Final report
(avec une synthèse sur http://ec.europa.eu/competition/sectors/pharmaceuticals/inquiry/
communication_fr.pdf ).
http://ec.europa.eu/competition/sectors/pharmaceuticals/inquiry/
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