Anthologie du droit - Généralités sur le principe du contradictoire - Droit processuel - 116

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GÉNÉRALITÉS SUR LE PRINCIPE DU CONTRADICTOIRE

Donc, l'autorité de chose jugée se justifie par la vérité contenue dans le
jugement5.
Comme l'autorité est conférée à la décision, non par nature, mais par la
volonté du législateur, l'autorité de la chose jugée entraîne donc nécessairement la
« vérité légale » du jugement6.
Par le même lien de nécessité, cela implique que le jugement n'admette pas
qu'on fasse la preuve de sa fausseté7.
98. Préférence à la vérité formelle. La discordance possible entre vérité matérielle et vérité légale ne peut pas faire exception à cette règle8.
La seconde prévaut donc sur la première9.
L'autorité de la chose jugée équivaut donc à la preuve non contestable de la
vérité du jugement10.
Cette analyse est confortée par le Code civil qui traite de l'autorité de la
chose jugée à propos des présomptions11.
On en a conclu que l'autorité de la chose jugée entraîne une présomption
irréfragable de vérité au bénéfice du jugement12.
99. Critique du droit positif. Justifié ainsi, ce système logique, reçu en droit
positif, ne peut que heurter l'esprit, puisque, paradoxalement, c'est en se fondant
5. Voir, par exemple, la note de Prosper WEIL, sous l'arrêt du Conseil d'État du 28 décembre
1949 « AUTOMOBILES BERLIET » (D. 1950, p. 383) qui affirme que « si le jugement a de l'autorité,
c'est parce que le juge est censé proclamer la vérité ».
6. Voir la démonstration de Gason JEZE « L'ACTE JURIDICTIONNEL ET LA
CLASSIFICATION DES RECOURS CONTENTIEUX » (R.D.P. 1909, p. 667 à 695, spéc. p. 669 à
674). Voir l'exposé de René CHAPUS « DROIT DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF » (précité, p. VIIl).
7. Voir, par exemple, Marcel WALINE « ÉLÉMENTS D'UNE THÉORIE DE LA
JURIDICTION CONSTITUTIONNELLE EN DROIT POSITIF FRANÇAIS » (R.D.P. 1928,
p. 441 à 462) qui expose que la décision est « tenue pour légalement vraie » et que c'est à cause de cela
« qu'elle aura autorité de chose jugée » (p. 443).
8. Ainsi SAVIGNY, cité par Jean FOYER « DE L'AUTORITÉ DE LA CHOSE JUGÉE EN
MATIÈRE CIVILE » (précité, p. 180) admettait que le jugement crée « une vérité fictive distincte de
la vérité réelle ».
ANDRÉ VINCENT « LE RECOURS EN RÉVISION CONTRE LES ARRÊTS DU
CONSEIL D'ÉTAT » (R.D.P. 1938, p. 423) en conclut qu'il est possible, concernant le jugement,
qu'« en fait, il est faux et injuste ; en droit, il est la justice et la vérité ».
9. C'est adopter une conception positiviste du droit, selon laquelle la volonté et non la vérité est
source légitime du droit. Sur ce rapport, voir Georges KALINOWSKI « LE PROBLÈME DE LA
VÉRITÉ EN MORALE » (précité, p. 23 et s.).
10. Voir, par exemple, Charles DEBBASCH « CONTENTIEUX ADMINISTRATIF » (précité, no 621 et s., p. 601 et s.). De même ANDRÉ VINCENT (précité, p. 423) affirme que « la présomption de vérité, qui s'attache aux décisions judiciaires, serait fort ébranlée dans l'opinion publique le
jour où ces décisions pourraient être indéfiniment contestées en justice au nom de la vérité ».
11. Avant lui, des auteurs qui l'inspirèrent, en particulier POTHIER « TRAITÉ DES
OBLIGATIONS » (no 885 à 887), affirmèrent que « l'autorité de la chose jugée fait présumer vrai et
équitable tout ce qui est contenu dans le jugement, et cette présomption, étant « juris » et « de jure »,
exclut toute preuve contraire ».
12. C'est l'élément auquel les auteurs classiques, comme JAPIOT ou MOREL, ont été le plus
sensibles. Voir aussi Louis BOYER « RÉFLEXIONS SUR LA REQUETE CIVILE » (R.T.D.C. 1956,
p. 55 à 85, spéc. no 26, p. 74/75). Mais Nicolas VALTICOS souligne que l'idée de vérité est « manifestement inconciliable avec le caractère irréfragable de l'autorité de la chose jugée » (no 51, p. 45).
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