Anthologie du droit - Généralités sur le principe du contradictoire - Droit processuel - 147

L'EXCLUSIVITÉ DU CONTRADICTOIRE

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De toute façon, la personne concernée est souvent la moins à même de reproduire exactement les événements77.
Dans ces conditions, l'aveu ne peut valoir que comme un témoignage contestable78, c'est-à-dire soumis à la contradiction, puisqu'il ne suffit pas par sa seule
force à établir la vérité79. Il n'en fait que nourrir le débat.
C'est pourquoi, dans la matière où le besoin de vérité est le plus aigu, c'est-àdire en procédure pénale, l'aveu est soumis à l'appréciation critique du juge et des
parties80.
Et l'importance accordée par les services de police à l'aveu est désapprouvée81.
La procédure administrative n'admet pas à proprement parler l'aveu comme
mode de preuve82, mais la jurisprudence accorde un effet semblable au silence de
l'administration, qui vaut aveu83.
77. Car l'aveu sincère peut être néanmoins faux. Voir, par exemple, l'analyse de François
GORPHE « L'AVEU DANS LA PROCÉDURE PÉNALE » (précité, p. 777).
78. Voir Robert VOUIN « L'AVEU DANS LA PROCÉDURE PÉNALE » (précité, p. 782).
79. Voir le rôle du débat en la matière, infra, p. 251 et s.
80. Ainsi, l'article 428 du Code de procédure pénale énonce : « L'aveu, comme tout élément de
preuve, est laissé à la libre appréciation des juges ».
81. Voir, de Jean SUSINI « L'AVEU : SA PORTEE CLINIQUE » (précité), « LES MOMENTS
CRITIQUES DE L'ENQUÊTE DE POLICE » (précité) et « ASPECTS MODERNES DE L'AVEU
(UNE AUTHENTIQUE PROBLÉMATIQUE POLICIOLOGIQUE » (R.S.C. 1984, p. 817 à 822).
82. Mais les articles 53-4 du décret no 63 766 du 30 juillet 1963, relatif au Conseil d'État, et
l'article R.113 du Code des tribunaux administratifs précisent que le silence du défendeur vaut
acquiescement. La jurisprudence applique cette règle (arrêt du Conseil d'État du 9 octobre 1968
« GROS », rec., p. 482) s'il ne résulte pas d'un simple retard à conclure (arrêt du Conseil d'État du
11 février 1983 « SYNCONEM », Tables p. 825) et si l'administration n'exerce pas son droit de contestation en appel (arrêt du Conseil d'État du 9 octobre 1968 « GROS », précité). Mais il ne s'agit pas
d'un principe général du droit et le mécanisme ne peut s'appliquer sans texte (arrêt du Conseil d'État
du 3 juin 1987 « GARCIA PALACIOS », Rec. p. 191).
En cela, le silence vaut aveu, dans le sens historiquement premier du terme (voir supra, p. 234/235,
note 765). Sur le lien entre aveu et acquiescement, voir Bernard PACTEAU « PREUVE » (Répertoire
Dalloz de contentieux administratif, tome II, no 39, p. 4).
Le droit civil pratique cette même assimilation, comme le montre l'arrêt de la deuxième chambre
civile du 26 novembre 1975 « LA PATERNELLE C/ BIANCHINI » (Bull. no 311, p. 249). Mais,
lorsqu'il s'agit du droit d'exercer une voie de recours, le silence ne présume pas l'acquiescement,
comme le disposent les articles 408 à 410 du Nouveau Code de procédure civile.
La chambre criminelle exige pareillement un acte exprès pour que soit reconnu l'acquiescement
de la partie civile (arrêt de la chambre criminelle du 3 mai 1957 « JABERG », Bull. no 353, p. 639 et du
13 octobre 1987 « GROS », Bull. no 350, p. 931), étant acquis que cette possibilité n'est pas offerte au
Ministère public qui ne dispose pas de l'action.
83. Car « Le refus de livrer la vérité est de nature à révéler la vérité », comme le souligne Pierre
DELVOLVÉ « LE JUGE ADMINISTRATIF ET LA VÉRITÉ (ASPECTS DE DROIT PUBLIC) »
(Annales de l'Université des sciences sociales de Toulouse, tome XXVI, 1978, p. 339 à 367, p. 352). Le
silence de l'administration est un « élément de preuve » à part entière, valant comme « présomption
très forte en faveur des requérants », selon le commissaire du Gouvernement LETOURNEUR, dans
ses conclusions sous l'arrêt du Conseil d'État du 28 mai 1954 « BAREL » (Rec., p. 308). Cette jurisprudence (G.A., no 92, p. 429, et les références citées) a été renforcée par l'arrêt du Conseil d'État du
21 décembre 1960 « VICAT BLANC » (Rec., p. 1093 ; D. 1961, p. 421, note René CHAPUS ; A.J.D.A.
1961, p. V.S.) qui n'exige plus que le requérant apporte un commencement de preuve de ses allégations.
Cette position, à la lecture des tables du recueil LEBON, aurait encore évolué en défaveur de l'administration dont l'acte serait annulé alors qu'il est justifié en appel, dès l'instant que l'administration n'a
pas fourni le motif nécessaire en première instance (arrêt du 5 février 1982 « Résidence Georges
BIZET », Rec., Tables p. 716) mais cette solution est qualifiée par les tables d'« implicite », et la lecture
intégrale de la décision par la consultation de la banque LEXIS ne la confirme en rien.
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