Anthologie du droit - Généralités sur le principe du contradictoire - Droit processuel - 23

CONTRADICTOIRE ET DROITS DE LA DÉFENSE

Un droit de la défense peut n'être conçu que dans l'intérêt du défendeur, et
c'est en cela que l'autonomie des droits de la défense se marque par rapport au
contradictoire28, qui est une charge et un bénéfice29 pour chacune des parties.
Le droit positif montre donc que les règles attachées au contradictoire sont
contenues dans celles qui sont liées aux droits de la défense, l'ensemble de ces dernières excédant les premières, lorsqu'elles ne concernent plus que le défendeur.
Il y a une relation de sous-ensemble entre le contradictoire et les droits de la
défense30.
Et pour les mécanismes qui leur sont communs, ce ne sont que deux façons
plus ou moins spécifiques d'exprimer les mêmes règles31.
C'est la relation du genre à l'espèce32.
Car la notion de contradictoire ne doit pas être présentée comme excentrée
par rapport à celle de droits de la défense, en y voyant une condition ou une
28. Va trop loin Olivier GOHIN « LA CONTRADICTION DANS LA PROCÉDURE
ADMINISTRATIVE CONTENTIEUSE » (précité) qui réserve les droits de la défense au seul défendeur, ce qui lui permet de considérer que « l'exercice des droits de la défense constitue une forme
limitée de contradiction ».
29. Voir infra, p. 343 et s.
30. Voir dans ce sens, Bruno BOCCARA « LA PROCÉDURE DANS LE DÉSORDRE - I LE
DÉSERT DU CONTRADICTOIRE » (JCP 1981 I 3004, no 20).
31. C'est l'attitude adoptée par le Conseil constitutionnel, qui « vise indifféremment le respect
des droits de la défense lorsque le caractère contradictoire d'une procédure se trouve en cause »
(Thierry RENOUX « LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET L'AUTORITÉ JUDICIAIRE,
L'ÉLABORATION D'UN DROIT CONSTITUTIONNEL JURIDICTIONNEL » précité, p. 354).
Cette habitude linguistique n'est pas sans entraîner une certaine confusion. Un exemple en est
donné par la loi du 19 juillet 1977 (loi no 77-806 « relative au contrôle de la concentration économique
et à la répression des ententes illicites et des abus de position dominante », J.O. p. 3833), dans son
article 16, qui dispose : « Le décret en Conseil d'État visé à l'article 20 de la présente loi précisera les
conditions de procédure de nature à assurer les garanties des droits de la défense devant la commission
de la concurrence. En toute hypothèse, la procédure devra présenter à l'égard de toute partie intéressée
un caractère pleinement contradictoire. ».
Cette rédaction laisse supposer l'existence de deux systèmes de règles autonomes, l'un régi par
la loi, l'autre laissé au règlement.
Mais les travaux préparatoires révèlent que le second alinéa de l'article a été ajouté sur avis de la
commission des lois du Sénat qui, craignant l'absence de décret, a voulu dès la procédure parlementaire, imposer la règle qui devait être développée plus tard si le pouvoir exécutif le voulait bien (Lég.
1976-1977, rapport Sénat no 409). Et le décret du 25 octobre 1977 (no 77-1189, J.O. p. 5223) qui précisa
les droits de la défense, édicta en effet des règles à rattacher plus spécifiquement à la contradiction. Le
système de règles désigné au premier et au second alinéa était donc bien unique, mais désigné de deux
façons différentes.
Cette analyse est confirmée par l'évolution du droit, puisque l'Ordonnance du premier décembre
1986 no 86-1243 « relative à la liberté des prix et de la concurrence » dispose simplement dans son
article 18 : « L'instruction et la procédure devant le Conseil de la concurrence sont pleinement contradictoires », (voir Louis VOGEL « Le contrôle des opérations de concentration économique depuis
l'ordonnance du premier décembre 1986 » JCP 1988, éd. E., II 15115, no 92).
32. Cette idée est exprimée par le Commissaire du gouvernement FRANC (sous l'arrêt du
Conseil d'État du 12 octobre 1979 « RASSEMBLEMENT DES NOUVEAUX AVOCATS DE
FRANCE », JCP 1980 II 19288), lorsqu'il expose que le principe du contradictoire « a toujours été
considéré dans l'état du droit atteint par nos sociétés occidentales comme une des expressions juridiques les plus achevées des droits de la défense en matière judiciaire ».
Voir aussi Georges WIEDERKHER « DROITS DE LA DÉFENSE ET PROCÉDURE
CIVILE » (précité) qui expose que « la notion de droits de la défense contient celle de contradictoire,
tout en étant plus compréhensive. ».

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