Anthologie du droit - Généralités sur le principe du contradictoire - Droit processuel - 46

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GÉNÉRALITÉS SUR LE PRINCIPE DU CONTRADICTOIRE

nettement qu'il s'agissait là d'un recours dirigé contre un acte, l'administration ne jouant que le rôle de son défenseur.
L'arrêt du Conseil d'État du 21 avril 1944 « DOCKÈS FRÈRES » pose, en
principe, que :
« Le litige soulevé par le recours pour excès de pouvoir... n'est pas un litige
entre parties. »
32. Réalité du contentieux. Cette position radicale a été mise en doute et ne
peut plus être soutenue aujourd'hui.
C'est : en particulier parce que, si l'administration, ou même le requérant, ne
sont pas des parties, le contradictoire ne peut jouer pour eux, que ce soit pour les
protéger ou pour les contraindre5.
Bruno KORNPROBST6 a montré, du point de vue sociologique, que cette réticence à donner à l'administration le statut de partie traduisait la résistance de celle-ci
à descendre au « rang » d'un simple particulier, et sa volonté de conserver des prérogatives et des avantages, dont cette qualité aurait entraîné la chute, avantages comme
l'impossibilité d'être condamnée au paiement des frais judiciaires, par exemple7.
D'autre part, du point de vue logique, l'on ne peut que reconnaître le caractère, sinon artificiel, du moins non fondamental, de la distinction entre la décision
et celui qui décide8.
Enfin, du point de vue sociologique, l'administration ne prend guère de distance par rapport à la décision attaquée et défend ses droits comme une véritable
partie, s'impliquant totalement dans le procès9.
5. R. CHAPUS « DROIT DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF » (1982, PARIS,
Éd. MONTCHRESTIEN, 924 pages) expose ainsi que le recours pour excès de pouvoir ne doit pas
être « un simple face-à-face entre le juge et la décision attaquée », mais qu'il faut au contraire admettre
la notion de partie car « il faut bien que le représentant légal de la personne au nom de laquelle la
décision a été prise combatte l'argumentation du requérant, pour que la procédure soit contradictoire,
et que le juge ait les meilleure chances de statuer en connaissance de cause » (no 87, p. 67).
Cette implication n'apparaît pas à Paul LOUIS-LUCAS « RECOURS POUR EXCÈS DE
POUVOIR ET DOUBLE DEGRÉ DE JURIDICTION » (précité) pour qui le fait que le Conseil
d'État soit « attaché au caractère contradictoire du recours » n'a aucune influence en la matière (p. 118).
6. L'auteur démontre dans sa thèse « LA NOTION DE PARTIE ET LE RECOURS POUR
EXCÈS DE POUVOIR » (précité) que le fond de l'affaire est que l'administration ne veut pas être
jugée. Elle a voulu l'éviter en présentant le recours pour excès de pouvoir comme un recours hiérarchique d'abord, puis comme un recours fait contre l'acte.
7. L'évolution du droit positif est ici très symptomatique. Par un arrêt du 11 mai 1938
« LANDEAU », le Conseil d'État pose qu'« aucune disposition législative ou réglementaire ne permet
de mettre à la charge de l'État les frais de timbre exposés à l'occasion d'un recours pour excès de pouvoir ». Puis, par un arrêt du 12 octobre 1956 « ROUSSEAU », (Rec. p. 360), le Conseil met à la charge
de l'État les dépens de première instance. AUBY et DRAGO « TRAITÉ DE CONTENTIEUX
ADMINISTRATIF » (précité, tome II, p. 136-137) traduisent cette évolution comme la marque d'une
implantation d'éléments subjectifs dans le contentieux objectif.
8.C'est en effet une distinction bien mince, qui contient une grande « part de fiction » (Raymond
ODENT « LES DROITS DE LA DÉFENSE », Études et documents du Conseil d'État, 1953, p. 57). Dans
le même sens, Charles DEBBASCH « CONTENTIEUX ADMINISTRATIF » (précité, no 726, p. 705).
9. Bruno KORNPROBST « LA NOTION DE PARTIE ET LE RECOURS POUR EXCÈS
DE POUVOIR » (précité, p. 85 et s.).
Raymond GUILLIEN « ESSAI SUR UNE RÉFORME GÉNÉRALE DU CONTENTIEUX
ADMINISTRATIF » (D. 1955, chron., p. 97) relève qu'elle fait preuve « d'acharnement et d'animosité »
comme tout autre plaideur.Ce phénomène est exacerbé par la compétence de droit commun conférée
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