Anthologie du droit - Généralités sur le principe du contradictoire - Droit processuel - 73

CONTRADICTOIRE ET PROTECTION DU TIERS

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Mais le droit positif a du mal à intégrer ce triple jeu.
Cela est illustré par les difficultés rencontrées en matière de brevets.
B. L'APPLICATION CONNEXE DU CONTRADICTOIRE,
DE L'AUTORITÉ ET DE L'EFFET DE LA DÉCISION
Ces règles doivent jouer en association pour tout jugement.
1. L'exemple de l'annulation des brevets d'invention.
Les jugements ont, en la matière comme dans toute autre, autorité relative58.
61. État du droit avant la réforme. Concernant les jugements annulant les
brevets d'invention, la jurisprudence, considérant que la décision était « relative »,
le titulaire d'un tel brevet pouvait de nouveau attaquer en contre-façon un tiers.
Cette jurisprudence appelait elle-même comme justification la relativité de la
chose jugée59.
Mais l'autorité relative de la chose jugée ne signifie pas que le résultat contenu
dans la décision ne puisse s'imposer au tiers. Cela est affaire d'opposabilité.
Dès lors, la doctrine notait justement que, par cette jurisprudence, le résultat
de la décision n'était plus une annulation proprement dite60, puisqu'au regard des
tiers le brevet n'était pas anéanti, mais seulement une inopposabilité du brevet à
la partie à l'instance61.
62. Loi du 13 juillet 1978. Le législateur est venu mettre bon ordre et, rappelant la distinction entre autorité et effets, a souligné que l'effet d'un tel jugement
était absolu, c'est-à-dire que le brevet annulé ne pouvait plus servir de base à une
nouvelle action en contrefaçon contre un tiers62.
58. Pour une application de la règle, voir, par exemple, l'arrêt de la Cour d'appel de PARIS
du 8 avril 1952 « CANTON » (A.P.l. 1952, p. 198 à 218, note Paul MATHELY) et le jugement du
Tribunal de grande instance de PARIS du 21 janvier 1982 « NOBLET » (P.I.B.D. 1982, III, p. 122).
59. Voir le jugement du Tribunal civil de la Seine du 31 juillet 1931 « GEORGES CLAUDE »
(A.P.l. 1933, art. 6894, p. 29).
Quand la jurisprudence ne poussait pas l'hérésie jusqu'à lier « l'effet relatif » de la décision au
caractère relatif de la nullité du brevet : voir, en ce sens, le jugement du Tribunal civil de LYON du 13 avril
1951 « HAUSSER » (A.P.l. 1957, p. 70) confirmé par l'arrêt de la Cour d'appel de LYON du 2 février
1952 (même référence). Dans le même courant, l'arrêt de la Cour d'appel de PARIS du 25 janvier 1960
« BILLARD » (A.P.l. 1960, p. 22 et s. note Alain CASALONGA) est suivi d'une note approbatrice selon
laquelle, en cas d'action du ministère public, c'est « la nullité absolue du brevet (qui) rend le brevet nul à
l'égard de tous... ». Alors qu'on sait, en théorie générale, que le caractère relatif ou absolu d'une nullité
n'interfère en rien dans les conséquences de l'annulation sur les tiers, auxquels elle est opposable.
60. Car prononce-t-elle encore une annulation, la juridiction qui pose qu'il convient « de prononcer cette nullité relativement aux parties au procès..., la nullité n'ayant un caractère absolu que
lorsqu'elle est demandée par le ministère public... » (arrêt de la Cour d'appel de LYON du 6 mars 1973
« JOLY », JCP 1974 II 17770, note Xavier DESJEUX) ?
Et la note sous l'arrêt en fait l'éloge, voyant là le rappel « fort à propos » de la relativité de la chose
jugée, l'article 1351 du Code civil s'opposant, selon lui, à ce qu'on reconnaisse un effet absolu à la nullité.
Par ces confusions successives, on quitte le terrain de l'annulation pour celui de l'inopposabilité.
61. Voir, dans ce sens, Jean-Mars MOUSSERON et Annie SONNIER « LE DROIT FRANÇAIS
NOUVEAU DES BREVETS D'INVENTION » (préface de Jean FOYER, Paris, 1978, Litec, coll.
« C.E.I.P.I., no 136, p. 131) et Yves REBOUL « ANNULATION DU BREVET » (in juris-classeur de
droit commercial (brevets), tome I, fasc. 340, no 39).
62. Voir la proposition de loi « modifiant et complétant la loi no 68-1 du 2 janvier 1968 tendant
à valoriser l'activité inventive et à modifier le régime des brevets d'invention », présentée par Jean
FOYER (J.O. A.N. « documents », 1977, no 2902, article 25, p. 20).
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