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SÉBASTIEN BERNARD

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en contrepartie de l'engagement de la privatiser ultérieurement (cas du Crédit
Lyonnais, du GAN et d'Air France) »16. Plus généralement, le processus de libéralisation des activités de service public poursuivi tout au long des années  1990
et 2000 interroge la raison d'être du secteur public17 : ouverture à la concurrence,
sociétisation, entrée de capitaux privés minoritaires, privatisation proprement
dite : ces quatre évolutions correspondent à des processus juridiques bien distincts mais force est de constater que dans nombre de cas, leur enchaînement
suggère qu'ils constituent les différents actes d'une pièce jouée de façon si répétitive que son déroulement semble sinon inéluctable du moins naturel.
L'un des terrains privilégiés de surveillance de l'évolution du secteur public par
les institutions européennes a trait aux modalités de transfert au secteur privé de
certaines entreprises publiques dites stratégiques à l'égard desquelles l'État souhaite conserver des prérogatives au-delà de leur privatisation. L'institution d'une
action spécifique à laquelle sont attachées un certain nombre de prérogatives
exorbitantes du droit commun est de nature à heurter le droit d'établissement si
elle a pour effet, par exemple, de limiter les participations d'entreprises de l'Union
européenne dans le capital des entreprises privatisées. De plus, le droit de l'Union
européenne défend également le droit des actionnaires à exercer leur souscription
préférentielle lors d'une augmentation du capital. Or, le droit d'agrément conféré
au ministre de l'Économie peut être de nature à empêcher une telle souscription18. La Cour de justice des Communautés européennes, dans un arrêt rendu
le 4 juin 2002, a ainsi jugé contraire au droit communautaire l'action spécifique
instituée en 1993 lors de la privatisation d'Elf-Aquitaine qui prévoyait une approbation préalable par le ministre de l'Économie de tout franchissement des seuils
de 10 %, 25 % et 33 % du capital19. D'une manière générale, la Cour de justice
veille à ce que les restrictions à la libre circulation des capitaux qu'entraîne automatiquement l'institution d'une action spécifique soient proportionnées et justifiées par l'article  65 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne
(application de législations fiscales à des contribuables dans des situations différentes, mesures indispensables pour faire échec aux infractions aux lois, mesures
justifiées par des motifs d'ordre public ou de sécurité publique) ou bien par la
théorie des raisons impérieuses d'intérêt général20.
C'est enfin une remise en cause bien plus frontale de l'un des deux statuts de
l'entreprise publique - celui d'établissement public industriel et commercial - qui se
16. D. Ritleng, « L'influence du droit communautaire sur les catégories organiques du
droit administratif », in J.-B. Auby et J. Dutheil de la Rochère (dir.), Droit administratif
européen, Bruylant, 2007, p.  845. S.  Bernard, « Privatisation des entreprises publiques »,
Jurisclasseur Propriétés publiques, fascicule no 80, 2011.
17. M. Lombard, « L'impact du droit communautaire sur les entreprises publiques », in
J.-B. Auby et J. Dutheil de la Rochère (dir.), Droit administratif européen, Bruylant, 2007,
p. 911.
18. V.  S.  Bernard, « Privatisation des entreprises publiques », Jurisclasseur Propriétés
publiques, fascicule no 80, 2011.
19. CJCE, 4 juin 2002, Comm. c/ France : AJDA 2002, p. 1128.
20. CJCE, 28  septembre 2006, Comm. c/  Pays-Bas : DA novembre  2006, p.  30, note
S. Blazy et M. Bazex.
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