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L'EUROPÉANISATION DU SECTEUR PUBLIC FRANÇAIS

profile avec l'arrêt rendu par la Cour de justice de l'Union européenne le 3 avril
201421. En considérant que le régime des établissements publics industriels et commerciaux constitue une garantie implicite et illimitée de la part de l'État en leur
faveur, la Cour de justice identifie une aide d'État incompatible avec le marché
intérieur. Ce faisant, elle apporte une réponse à un feuilleton entamé plus d'une
dizaine d'années plus tôt qui a vu la Commission s'intéresser successivement à divers
établissements publics industriels et commerciaux français parmi lesquels EDF, La
Poste ou encore la SNCF22. La portée pratique de ces décisions a souvent été limitée
dans la mesure où les autorités françaises avaient parfois procédé à la « sociétisation »
avant le terme des procédures engagées à l'encontre des entreprises concernées. Le
caractère définitif de la décision rendue par la Cour de justice en 2014 qui a rejeté
les nombreux arguments du gouvernement français et l'ouverture d'une procédure
à l'encontre du statut de la SNCF que le législateur ne semblait pas avoir l'intention
de « sociétiser » donnent une importance particulière à la question.
Pour la Cour de justice, le statut d'établissement public industriel et commercial implique une garantie implicite et illimitée de l'État. Celle-ci est établie à
partir d'un faisceau d'indices qu'établissent plusieurs arguments successivement
avancés par la Commission et le Tribunal de l'Union européenne23. Le premier
tient au fait que le droit français n'exclut pas qu'une garantie de l'État puisse exister
sans être explicitement prévue dans un texte. En vertu d'une position constante du
Conseil d'État, la responsabilité de la puissance publique peut être mise en jeu en
cas d'insolvabilité d'une entité publique. Le deuxième argument revient à constater que les procédures collectives ne sont pas applicables aux établissements publics
industriels et commerciaux. La loi no  80-539 du 16  juillet 1980 relative aux
astreintes prononcées en matière administrative et à l'exécution des jugements par
les personnes morales de droit public se substitue au droit des procédures collectives et régit le sort des créances sur les établissements publics industriels et commerciaux. Or, les autorités européennes considèrent que ce régime est plus favorable aux créanciers dans la mesure où il ne permet notamment pas un effacement
pur et simple des créances. Le troisième argument s'efforce de montrer qu'en cas
de défaillance d'un établissement public industriel et commercial, l'État est obligé
de se substituer à lui pour le règlement de la dette : « une fois les ressources propres
de l'établissement public défaillant épuisées, des fonds étatiques viendront, selon
toute probabilité, honorer les dettes de l'établissement public débiteur »24.
21. CJUE, 3  avril 2014, no  C-559/12, France c/  Commission, concl. Niilo Jääskinen.
V. notamment l'excellente analyse de G. Eckert, « De la garantie implicite à la mise en cause
explicite des EPIC », JCP ACT 2014, 2160.
22. V.  notamment D.  Bailleul, « Vers la fin de l'établissement public industriel et
commercial ? À propos de la transformation des EPIC en sociétés », RJEP 2006, no  629,
p. 105 ; M. Lombard, « L'établissement public industriel et commercial est-il condamné ? »,
AJDA 2006, p. 79 ; S. Nicinski, « La transformation des établissements publics industriels et
commerciaux en sociétés », RFDA 2008, p. 35.
23. Trib.  UE, 20  septembre 2012, France c/  Commission, aff.  T-154/10 : AJDA 2012,
p. 2313, obs. M. Lombard.
24. Trib. UE, 20 septembre 2012, France c/ Commission, aff. T-154/10, pt 86.
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