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LAETITIA GUILLOUD-COLLIAT

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raison suffisante pour tout autre juge de considérer cet acte comme non valide
pour les besoins d'une décision qu'il doit rendre »57.
Or, il semble difficile d'évoquer un véritable dialogue quand la « discipline
juridictionnelle »58 impose au juge national de se conformer à une jurisprudence
européenne. En revanche, un tel dialogue peut s'instaurer si, dans la réponse
qu'elle apporte, la Cour de justice tient compte de la position prise par la juridiction interne, fût-ce en contradiction avec sa propre jurisprudence. Ainsi, comme
le remarque Joël Andriantsimbazovina l'expression de « dialogue des juges » est
née « dans un contexte où le Conseil d'État s'opposait frontalement à la Cour de
justice des Communautés européennes à propos de l'effet direct des directives
communautaires »59, le commissaire du gouvernement proposait alors de recourir au renvoi préjudiciel à la Cour de justice « afin de parvenir à trouver avec celleci une autre interprétation acceptable par les deux juridictions »60. Le juge administratif n'ayant pas suivi les conclusions de son commissaire du gouvernement,
l'occasion a été manquée et le Conseil d'État s'est finalement rallié à la jurisprudence européenne61.
En outre, on ne peut évoquer la procédure prévue par l'article 267 TFUE sans
mentionner le caractère obligatoire du renvoi qui pèse sur les juridictions
suprêmes. En effet, selon les termes de l'article 267 TFUE, lorsqu'une question
portant sur l'interprétation ou sur l'appréciation de la validité du droit de l'Union
européenne « est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles d'un recours juridictionnel de
droit interne, cette juridiction est tenue de saisir la Cour ». Là encore, l'hypothèse
d'un dialogue des juges peut être contestée. Ainsi, selon Laurence Burgorgue-Larsen, « l'obligation de renvoi exclut le dialogue qui est un moment où se manifeste
immanquablement une part de liberté propre à l'échange d'arguments »62. Il est
vrai que la Cour de justice, dans son arrêt CILFIT63, a atténué cette obligation de
renvoi. Elle considère en effet que ce dernier ne s'impose pas lorsque « la question
n'est pas pertinente, c'est-à-dire dans les cas où la réponse à cette question, quelle
qu'elle soit, ne pourrait avoir aucune influence sur la solution du litige »64, quand
« la question soulevée est matériellement identique à une question ayant déjà fait
l'objet d'une décision à titre préjudiciel dans une espèce analogue »65, ou bien
encore lorsque « l'application correcte du droit communautaire peut s'imposer
57. CJCE, 13  mai 1981, SpA International Chemical Corporation c/  Amministrazione
delle finanze dello Stato, aff. 66/80, Rec. p. 1191 et s., pt 13.
58. B.  Genevois, « Le Conseil d'État et la Convention européenne des droits de
l'homme », Gaz. Pal. 12 juin 2007, p. 1620.
59. J. Andriantsimbazovina, « L'autorité de la chose interprétée et le dialogue des juges »,
in Le dialogue des juges. Mélanges en l'honneur du président Bruno Genevois, op. cit., p. 18.
60. Ibid., p. 19.
61. CE, ass., 30 octobre 2009, Mme Perreux, Lebon p. 408. V. supra.
62. L.  Burgorgue-Larsen, « De l'internationalisation du dialogue des juges », in Le
dialogue des juges. Mélanges en l'honneur du président Bruno Genevois, op. cit., p. 101.
63. CJCE, 6 octobre 1982, CILFIT e.a. c/ Ministère de la Santé, aff. 283/81, Rec. p. 3415 et s.
64. Ibid., pt 10.
65. Ibid., pt 13.
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