CRFPA - Méthodologie des épreuves écrites et de l'exposé-discussion - 2è - 47

CHAPITRE 1 - ÉPREuVE DE lA NoTE DE SyNTHèSE

- s'agissant de la décision définitive adoptée par la Commission européenne, le juge
saisi d'une action en dommages et intérêts ne peut « prendre une décision qui irait
à [son] encontre... » (C. com., art. L. 481-2, al. 3, en liaison avec l'article 16, paragraphe 1
du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil du 16 décembre 2002 relatif à la mise en œuvre
des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité instituant la Communauté
économique européenne, devenus articles 101 et 102 du traité sur le fonctionnement de
l'Union européenne).
Pourtant, l'article 9 de la directive 2014/104/UE n'imposait nullement une réduction du
domaine de la présomption irréfragable. Certes, seules les décisions de l'autorité de
l'État membre concerné ont la valeur de présomption irréfragable (dir. 2014/104/UE,
art. 9, § 1). Toutefois, les décisions des autorités des autres États membres doivent « au
moins » avoir la valeur de preuve prima facie. Il était ainsi tout à fait loisible au législateur
français pour se conformer au droit national préexistant d'imposer une présomption irréfragable aux décisions de condamnation des autres autorités nationales de concurrence
de l'Union européenne ainsi qu'à celles de la Commission européenne.
La transposition de la directive 2014/104/UE manque donc l'occasion d'étendre à toutes
les demandes en réparation la présomption irréfragable, que ces demandes soient portées en justice par une action individuelle, une action de groupe, voire une autre forme
d'action collective.
En matière d'action de groupe, non seulement le mécanisme de l'action consécutive qui
entrave significativement l'accès du justiciable au juge de la réparation, subsiste. Mais le
domaine de la présomption irréfragable, présentée à l'époque de l'introduction de l'action
de groupe comme une contrepartie à ce mécanisme, est réduit à une portion congrue
au nom du régime général de l'action en dommages et intérêts de fait des pratiques
anticoncurrentielles. Le mécanisme d'action consécutive est d'autant plus contestable
que l'Autorité de la concurrence peut être consultée par les juridictions sur les pratiques
anticoncurrentielles définies aux articles L. 420-1, L. 420-2, L. 420-2-1 et L. 420-5 ainsi
qu'aux articles 101 et 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et
relevées dans les affaires dont elles sont saisies (C. com., art. L. 462-3, al. 1er).
Le législateur français a donc fait le choix de réformer, avant même tout retour d'expérience pratique, l'action de groupe dans le domaine de la concurrence. Il s'agit non de
se conformer à la directive 2014/104/UE, dont l'objectif est au contraire d'encourager
les actions en réparation du fait des pratiques anticoncurrentielles. L'aménagement des
règles de la preuve en matière d'action de groupe ne crée pas davantage de conditions
favorables au développement des actions en réparation en droit de la concurrence. Il
ne garantit pas non plus une meilleure indemnisation des victimes, ni ne promeut un
meilleur fonctionnement des marchés.
En vérité ni la directive, ni le droit français ne justifient cette régression portée au
mécanisme probatoire, instauré à l'occasion de l'introduction de l'action de groupe
dans le domaine de la concurrence 2 ans auparavant, cumulé au mécanisme de l'action
consécutive.

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