Précis Domat - Histoire du droit des affaires - 3e - 390

HISTOIRE DU DROIT DES AFFAIRES

laisse le reçu. La remise du reçu valait quittance. Ce procédé, possible, présentait
de solides inconvénients : le titre ne pouvait être qu'au porteur, donc il était soumis
à tous les aléas des vols, des pertes. Il ne laissait pas de trace.
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Préparation de la loi. - Tout ceci attire l'attention du gouvernement de Napoléon III qui se préoccupe de donner des facilités au commerce afin de soutenir la
concurrence avec l'étranger (nous sommes dans les années qui suivent le traité du
libre-échange de 1860) et d'encourager les épargnants à déposer leur argent dans
les établissements de dépôt et de crédit qui le réinjectent dans le commerce et l'industrie. Henri Germain est là pour activer les choses.
Une commission extra-parlementaire est réunie. Sa composition montre l'importance qui est accordée par le monde politique et le monde des affaires à la question qu'elle doit traiter. Entre autres figurent parmi ses membres Rouher, ministre
d'État, ministre du Commerce, Morny, président du Corps législatif et par ailleurs
homme d'affaires, Germiny, ancien gouverneur du Crédit Foncier et gouverneur de
la Banque de France, Vuitry, ancien gouverneur de la Banque de France et ministre
présidant le Conseil d'État (beau-père d'Henri Germain par ailleurs), Gouin, banquier, l'avocat Ollivier, futur Premier ministre... Lors des travaux de la commission
et des débats devant les chambres, le monde des banquiers et des négociants
demanda :
- que le chèque ait la faculté de se transmettre par endossement ;
- qu'il puisse donc être fait à personne dénommée, à ordre ou au porteur,
suivant la volonté des parties ;
- qu'il puisse être tiré sur la même place ou sur une place différente ;
- surtout qu'il soit exempt de droit de timbre ou du moins n'ait à supporter
qu'un timbre forfaitaire très réduit.

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La loi de 1865. - Le législateur du Second Empire eut un peu peur qu'avec
toutes ces faveurs, surtout fiscales, le chèque ne concurrençât les autres effets de
commerce, en particulier la lettre de change. Aussi la loi qu'il finit par voter le
14 juin 1865 comportait-elle des dispositions assez compliquées89. Mais l'essentiel
était gagné : la loi décidait que le chèque était exempt de timbre pendant dix ans.
Ce qui n'empêcha pas le gouvernement de la Défense nationale en 1871 de le soumettre à un timbre forfaitaire. En 1873, les besoins de trésorerie de l'État faisaient
taxer les chèques de place à place d'un montant supérieur. Les banquiers préférèrent alors délivrer à leurs clients des carnets de chèques portant le timbre fiscal.
Malgré ce handicap, le chèque fit en France de rapides progrès et eut, comme le
législateur l'avait prévu, tendance à se substituer aux autres effets de commerce
plus traditionnels. Une chambre de compensation avait été créée à Paris dès 1872.
À la fin du siècle, on tirait en France environ 7 600 000 chèques dans l'année (en
1899) ; en 1904, 9 300 000, ceci moins de quarante ans après la création de ce nouvel effet de commerce.

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89. Fort courte, elle ne comptait que sept articles. Voir DUVERGIER, Collection complète des lois, t. 65,
Paris, 1865, p. 208-236, avec un très long commentaire et note sur l'historique de cette loi, sa discussion,
ses dispositions.

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