Grands Colloques - Les figures du juge administratif - 19

PROPOS INTRODUCTIF

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Que nous montrent ces autoportraits, de l'office du juge et de ses
métamorphoses ?
Lorsque l'on regarde un autoportrait, l'œil se dirige certes d'abord vers
la figure principalement représentée ; il la saisit d'un coup. Rapidement, il
s'attache toutefois à des éléments autres, surtout à des éléments d'extranéité
ou de contexte : le chapeau ou le bandage de Van Gogh4, la clé d'argent
qui pend à la ceinture de Vélasquez5, l'atelier dans lequel peint Goya, vêtu
d'un chapeau haut de forme sur le bord duquel sont plantées des bougies
éteintes6... Ces éléments disent autant de la figure du peintre que cette
figure en elle-même ; elles sont autant de « confidences d'atelier »7. Puis,
l'œil revient sur la figure pour tenter de la cerner et, éclairé par son environnement, en saisir la juste portée.
Je propose de suivre le même chemin : d'abord, de s'attacher à des
éléments de contexte permettant d'éclairer à la fois pourquoi le juge décide
d'exposer son office et de le faire évoluer et dans quel cadre il le fait (I). Je
tracerai ensuite quelques grandes lignes qui me semblent caractériser les
figures actuelles du juge administratif (II).

I - CE QUE DÉVOILENT LES ÉLÉMENTS
DE CONTEXTE
Plusieurs éléments peuvent conduire le juge à définir son office, à l'expliciter ou à le faire évoluer. Ils constituent ainsi le cadre et la toile de son
autoportrait.

4. Par exemple Autoportrait au chapeau de feutre gris, 1886-1887 ; Autoportrait au chapeau
de paille, 1888 ; Autoportrait au bandage, 1888.
5. Autoportrait, 1640.
6. Autoportrait, 1793.
7. Selon Pascal Bonafoux, la clé pendant à la ceinture de Vélasquez symbolise sa fonction
de valet de chambre du roi. Si cette clé est en argent et non en or et si Vélasquez ne se représente pas en peintre, c'est précisément parce que les grands d'Espagne, du fait de ce travail
manuel, sont réticents à l'idée de l'anoblir alors même que le roi le souhaite (P. Bonafoux,
op. cit., p. 26). De même, à propos de la peinture de Goya, l'historien de l'art nous dit : « Il y
a à l'Academia San Fernando de Madrid un autoportrait de Goya singulier. Il se représente
dans un atelier. Il est au travail. [...] Il porte un chapeau. Il faut regarder ce chapeau de près.
Des bougies sont plantées sur le rebord de l'étrange haut-de-forme tassé qu'il porte. D'où
cette hypothèse : si les écarts chromatiques ont, dans son œuvre, cette intensité particulière,
ne serait-ce pas parce que Goya, après avoir travaillé pendant la journée avec la lumière du
jour dont l'inonde la verrière de l'atelier, continue de peindre la même toile, une fois la nuit
tombée, à la seule lumière des bougies plantées sur son chapeau. L'intensité de la lumière est
loin d'être la même... L'autoportrait serait-il une manière de confidence d'atelier ? » (Ibid.).
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