Grands Colloques - Les figures du juge administratif - 49

MARYSE DEGUERGUE

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puisque l'administration pourra reprendre l'acte litigieux en se fondant
sur des motifs légaux, annulation d'autant plus inutile qu'elle va créer un
désordre certain et vain ; ensuite, éviter à l'administration de perdre du
temps pour réexaminer le dossier et prendre une nouvelle décision, dont
elle aurait pu faire l'économie ; enfin, éviter à l'administré d'engager un
procès stérile contre une nouvelle décision, dont la légalité sera presque
certaine, ce qui rendra ce nouveau procès normalement voué à l'échec. Ces
avantages sont liés au pragmatisme et au réalisme du juge administratif,
qui s'avèrent de plus en plus prégnants dans le contentieux de l'excès de
pouvoir, comme en témoigne aussi la modulation dans le temps des effets
d'une annulation contentieuse, quand elle est prononcée.
Au regard de ces avantages, il peut y avoir aussi trois types d'inconvénients à recourir aux techniques de la substitution : le premier consiste
à obscurcir un peu plus la distinction entre les contentieux de l'excès de
pouvoir et de la pleine juridiction. L'incursion du juge de l'excès de pouvoir
dans le processus décisionnel est marquée par l'usage de la formule « il
résulte de l'instruction », formule normalement réservée aux décisions
rendues dans un contentieux de pleine juridiction, et qui s'explique ici par
le fait que le juge, on l'a vu, doive vérifier que l'administration aurait pris la
même décision, si elle s'était initialement fondée sur le motif substitué, ce
qui suppose qu'il s'enquière d'un certain nombre d'éléments d'appréciation.
D'un autre côté, le juge de l'excès de pouvoir qui opère une substitution
de motifs se reporte toujours à la situation de droit et de fait existant à la
date de la décision attaquée, et non à celle qui existe lorsqu'il statue, ce
qui ne serait pas le cas d'un juge de plein contentieux. Les techniques de
substitution de base légale ou de motifs participent donc d'une certaine
manière au développement du contentieux objectif de pleine juridiction.
Et d'ailleurs la substitution de motifs, telle qu'elle résulte de l'arrêt Hallal,
a d'abord été reconnue dans le contentieux des sanctions administratives,
emblématique du contentieux objectif de pleine juridiction.
Le deuxième inconvénient tient à la reconnaissance implicite d'un droit
à l'erreur au profit de l'administration ou tout au moins d'un droit à la
négligence dans le traitement juridique d'une demande ou d'un dossier,
puisque l'administration sait qu'elle a droit en quelque sorte à une session
de rattrapage devant le juge, en cas de recours contre l'acte qu'elle a pris. Les
techniques de substitution n'incitent donc pas l'administration à la rigueur
et pourraient même développer au sein de certaines administrations un
penchant pour une motivation provisoire, dont elles pourraient demander
a posteriori la modification au juge. Toutefois, cet inconvénient est atténué
par la faculté que se reconnaît le juge de procéder à la substitution ou de ne
pas y recourir, puisqu'elle n'est en aucun cas une obligation pour lui, même
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