Anthologie du droit - Méthode d'interprétation et sources en droit privé positif - Tome 2 - 105

LA LIBRE RECHERCHE SCIENTIFIQuE

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facilement à assouplir, par le jeu de la volonté libre, la propriété typique, que nous
avons héritée du droit romain, à constituer notamment des formes de copropriété,
adaptées à tous nos besoins économiques275, à créer des patrimoines d'affectation,
dont le régime puisse être fixé par leur affectation même276, à permettre, en dehors
des servitudes consacrées par nos lois, des démembrement de la propriété, qui
multiplient les formes de son usage et accroissent, par là même, l'utilité des
biens277. - Et, tout cela sera possible, par un simple développement du principe de
la volonté autonome, pourvu, toutefois, que les droits des tiers n'en soient pas
atteints, et que le respect des intérêts de tous se trouve également assuré. Je ne
disconviens pas, d'ailleurs, que cette réserve générale commande souvent des restrictions importantes et puisse même requérir parfois une réglementation de
formes ou de publicité, que l'interprétation libre serait impuissante à organiser, à
elle seule278 ; du moins, pourrait-elle montrer la voie et préparer, par ses solutions
libérales, l'intervention des organes formels du droit positif (loi ou coutume), qui
viendraient, après coup, compléter le système, ébauché par les chercheurs indépendants. - En tout cas, et si l'on reculait devant certaines difficultés d'application, dans les hypothèses qui viennent d'être indiquées, on ne saurait hésiter, du
moins, à interpréter les contrats de la vie courante, sans prétendre les rattacher
toujours à un type légalement organisé, en sanctionnant directement la volonté
qui les anime279. Or, cette volonté se révélera, à défaut de formules nettes, dans le
but essentiel de l'opération, éclairé lui-même par les circonstances morales, psychologiques, économiques280, sociales, enfin, qui l'auront accompagnée. Seul,
l'examen de ces circonstances permettra de discerner, par voie de présomption,
l'intention obscure des contractants281. Et, à défaut d'une présomption de volonté
proprement dite, il incombera à l'interprète, d'y suppléer par la considération des
intérêts en présence (voy. ci-dessous, n° 173), dont la balance établira une proba275. Voy. par ex. R. Saleilles, dans Annules de droit commercial, 1897, p. 43-47, 7, Étude sur
l'histoire des sociétés en commandite, nos 65-68. - Adde, quant à l'indivision héréditaire, ma note, sous
Req. rej, 7 juillet 1892, Pand. franç. périod., 1893-1-433 à 436, et spécialement p. 435.
276. Voy. encore note de R. Saleilles, sous Dijon, 30 juin 1893, Sir. 94-2-185.
277. Voy. déjà : Aubry et Rau, Cours de droit civil français, §§ 221 bis et 223, t. I5, 1897, p. 585588, p. 629-630.
278. Comp. Fr. Geny, dans : Revue bourguignonne, 1897, t. VII, p. 211. - Revue critique de législation et de jurisprudence, 1899, nouv. sér., t. XXVIII, p. 461.
279. [Il y aura lieu de compléter, et, au besoin, de rectifier, ce qui a été simplement indiqué ici,
par les développements, qui seront fournis à propos des catégories réelles, envisagées comme procédés
de la technique juridique, dans Science et technique en droit privé positif, t. III, Élaboration technique
du droit positif (à paraître).]
280. Voy. un exemple intéressant d'une clause conventionnelle, interprétée d'après des considérations économiques, dans une note d'E. Chavegrin, sous Req. rej., 21 avril 1896, Sir, 97-1-481 à 484.
- Adde W. V. Blume, dans Kritische Vierteljahresschrifl für Gesetzgebung und Rechtswissenschaft, 18971898, t. XL, p. 33-38.
281. Voy. ce que j'ai dit, à propos d'une hypothèse concrète, dans Revue bourguignonne de l'Enseignement supérieur, 1897, t. VII, p. 212-213. - J'ajoute que l'interprète, une fois certaine l'intention
concrète du disposant (ou des parties), doit se garder d'y faire échec, en la ramenant à une catégorie
juridique, qui l'invaliderait, alors qu'il est possible de la maintenir. [Comp. ma note sous Cass. Ch. réun.,
2  juillet  1903, Pand. franç. pér. 1903, 1, p.  497-504, surtout, III, p.  501-503] - Voy. un exemple du
procédé, que je réprouve, dans Amiens, 21 février 1893, Sir. 95, 2, 57 (passage inséré au Sir. p. 63, col.
1, et rapport de M. le Conseiller Cotelle à la Chambre des requêtes, sur cet arrêt. Sir. 95, 2, p. 64-67.
passim). - Au contraire, la Cour suprême sait fort bien maintenir la validité des dispositions, arguées
du vice de substitution prohibée, en les qualifiant omni meliore modo. Voy. note de Léon Michel, sous
Civ. rej., 10 novembre 1896, D. P. 99, 1, p. 210 à 213. - Sur le principe, énoncé au texte, cpr. O. Lenel,
Parteiabsicht und Rechtsfolge, dans Jahrbücher für die Dogmatik, t. XIX, 1881, p. 154 et sq.
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