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La responsabilité du service public hospitalier

aurait pu prétendre. De la même manière, si le préjudice était de 200 et ses
chances de refus seulement de 10 %, le juge n'accordera que 20 (200 x 0,1).
Cette méthode a été étendue au cas plus classique des chances de guérison compromises par une faute médicale ou une erreur dans l'organisation du service par la décision de section du 21 décembre 2007, Centre hospitalier de Vienne (Rec. CE, p. 546, concl. T. Olson), qui concernait une erreur
de diagnostic. La motivation de l'arrêt est particulièrement explicite : « Dans
le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou le traitement d'un
patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances
d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage corporel
constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu. La
réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du
dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue ». Cette approche nouvelle de la détermination du préjudice est applicable à tous les litiges, quelle que soit la date des faits qui leur ont donné
naissance (CE, 22 oct. 2014, Centre hospitalier de Dinant c/Consorts Étienne,
nº 368904 : Rec. CE. p. 316).
La perte de chance sanitaire est donc désormais regardée comme le préjudice certain et direct que constitue le fait, pour le patient, d'avoir été privé
de la possibilité raisonnable qu'il avait de guérir ou de survivre. La perte d'une
chance se définit comme la perte de l'espoir d'un avantage futur : par exemple une césarienne tardive faisant perdre une chance d'atténuer les lésions
neurologiques consécutives à un accouchement difficile (CE, 26 mai 2010, M. et
Mme Pradeau, nº 30635 : Rec. CE T., p. 976 et p. 981), un retard de prise en
charge d'une fracture faisant perdre une chance d'échapper à ses complications (CE, 6 nov. 2013, M. Potignon, nº 352480 : Rec. CE T., p. 839), un diagnostic
tardif d'un cancer faisant perdre une chance d'échapper à l'issue fatale (CE,
2 mai 2016, M. Mezzarobba, nº 383044). Il appartient au juge de raisonner chef
de préjudice par chef de préjudice pour déterminer si la faute de l'hôpital a
directement entraîné un préjudice ou si elle a seulement fait perdre une
chance de l'éviter (pour une illustration de la distinction, v. CE, 10 déc. 2015,
M. Exantus, nº 374318 : Rec. CE T., p. 871 : l'erreur de diagnostic d'un accident
survenu dans un cadre professionnel est directement à l'origine du retard
d'obtention d'une rente d'accident du travail mais a induit seulement une
perte de chance d'atténuer la douleur de la victime).
Dans tous les cas, l'appréciation du taux de perte de chance est un exercice fort délicat. Certains auteurs ont plaidé pour une approche objectivée
par une formule mathématique7, que la jurisprudence n'a pas encore fait
7. Voir sur ce point J. Boré, « L'indemnisation des chances perdues, une forme d'appréciation
quantitative de la causalité d'un fait dommageable », JCP 1974, I 2610 ; F. Puigserver,
« L'évaluation de la perte de chance en matière hospitalière : une tentative d'unification »,
RFDA 2008, p. 1036 ; et L. Marthinet, « Perte de chance : de l'intuition à la modélisation »,
AJDA 2017, p. 1654.

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