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La responsabilité du service public hospitalier

En théorie, sa mise en œuvre est censée replacer la victime dans une
situation identique à celle qui existait avant l'accident et qui aurait perduré
en son absence. Formulé ainsi, ce principe est évidemment une fiction : dès
lors que les dommages causés au sein du service public hospitalier sont
toujours principalement physiologiques, l'octroi d'indemnités ne permettra
jamais de rendre à la victime la plénitude de ses moyens. En cas de décès,
la fiction de la réparation intégrale du préjudice est encore plus manifeste.
Il n'en demeure pas moins que ce principe implique une évaluation des
préjudices au plus près de ce qu'ils sont réellement, ce qui est relativement
aisé pour les préjudices matériels. L'indemnisation permettra de compenser au moins les dépenses assumées par la victime ou par les organismes
sociaux et d'assurances, à divers titres.
La règle de la réparation intégrale du préjudice implique que la victime
n'a pas l'obligation de minimiser son préjudice : le juge ne peut ainsi tirer
aucune conséquence du fait qu'une victime refuserait de subir une intervention chirurgicale réparatrice qui serait susceptible d'atténuer son préjudice
(CE, 3 déc. 2010, Gandia, nº 344622 : Rec. CE T., p. 976, 977, 981). Il n'est pas
davantage possible de tirer des conséquences de l'état de santé initial de
la victime qui la prédisposait au risque survenu (CE, 6 nov. 2013, BotuliKadima, nº 352492 : Rec. CE T., p. 829).
À l'inverse, la réparation intégrale ne doit pas permettre à la victime un
enrichissement qui serait sans cause, ce qui implique la présentation de
justificatifs à l'appui de la demande. Un principe d'ordre public en contentieux administratif suppose qu'une personne publique, comme un hôpital, ne
soit pas condamnée à payer une somme qu'elle ne doit pas : le juge doit
soulever d'office ce moyen, le cas échéant (CE, sect., 19 mars 1971, Mergui :
Rec. CE, p. 235, concl. Rougevin-Baville)9.
En conséquence de ce principe, le juge n'est pas tenu d'accorder une
somme au moins égale à celle que l'administration s'était déclarée prête à
verser lors de la procédure amiable (CE, 29 nov. 2004, M. Tibere, nº 242384 :
Rec. CE T., p. 876). Il doit, par ailleurs, déduire d'office les prestations déjà
perçues par la victime en compensation du dommage, même si celles-ci
ne font pas l'objet d'un recours subrogatoire de la part des tiers payeurs,
et inviter dans cette perspective la caisse à indiquer le montant des frais
qu'elle a pris en charge (CE, 12 sept. 2009, Mme Rambeau, nº 301216 : Rec. CE
T., p. 952). Cette solution vaut y compris pour la prestation de compensation
du handicap, que le Conseil d'État déduit, à la différence de la Cour de cassation, des indemnités perçues10 (CE, 23 sept. 2013, Centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne, nº 350799 : Rec. CE T., p. 432, 839, 840).

9. Il n'est pas inutile de préciser que le même principe vaut pour les personnes privées, qui
ne peuvent être condamnées à verser des sommes qu'elles ne doivent pas.
10. Cass. 1re civ., 19 mars 2015, nº 14-12792.

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