Bibliothèque de droit privé - Le fiduciaire défaillant - Tome 563 - 156

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LE FIDUCIAIRE DÉFAILLANT

que ce registre soit créé à partir des déclarations déposées par lui au centre des
impôts dans le cadre de la déclaration d'existence de la fiducie.
295. Formalisme ad validitatem. Les formalités que requiert le contrat de
fiducie ne procèdent pas d'un simple formalisme ad probationem, mais bien d'un
formalisme ad validitatem. En cas de non-respect de ces prescriptions, le contrat
de fiducie est nul, d'une nullité d'ordre public, puisqu'elle sanctionne la violation
d'une règle d'ordre public, relative à la lutte contre la fraude fiscale et le blanchiment d'argent21. Cette nullité a pour conséquence d'anéantir rétroactivement
l'existence même du contrat de fiducie. Les biens fiduciés sont réputés n'avoir
jamais quitté le patrimoine du constituant et le patrimoine affecté est quant à lui
censé n'avoir jamais été créé22.
296. Critique. Ces conditions de forme et leur sanction par la nullité d'ordre
public semblent contraires aux usages du commerce, domaine principalement
intéressé par la fiducie française telle que conçue aujourd'hui23. Incompatibles
avec la rapidité des transactions, elles rebuteront sans doute toute utilisation de la
fiducie sur de courtes périodes, que ce soit à titre transitoire en attendant le
dénouement d'autres opérations ou d'autorisations, comme le suggérait le rapport de M. le sénateur de RICHEMONT24, ou lors de partenariats ponctuels
pour lesquels les compagnies anglo-américaines n'hésitent pas à créer un
trust. D'ailleurs, la fiducie apparaît comme une institution d'exception, qui « sur
ce plan [de l'enregistrement], est aux antipodes du trust, mais aussi de la fiducie
de maints pays de tradition civiliste »25, ce qui n'est pas de nature à inciter à son
emploi, bien au contraire. Ceci ne peut que desservir le nouveau contrat, pourtant
institué dans le but avoué de concurrencer les droits d'autres pays dont les législations, plus souples, leur ont permis de rallier à leurs territoires - et donc à leurs
impositions - des entreprises parmi les plus puissantes et les plus lucratives26.
leur sont confiées, le juge d'instruction, le procureur de la République, les officiers de police judiciaire,
les agents des douanes mentionnés à l'article 28-1 du code de procédure pénale, les agents du service
TRACFIN et les agents habilités de la direction générale des finances publiques chargés du contrôle
et du recouvrement en matière fiscale ». Avant la publication de ce décret, un certain nombre d'auteurs pensait que ce registre national servirait de registre de publicité, tel celui qui existe en matière de
publicité foncière (cf. par ex., Ph. DUPICHOT, « La fiducie-sûreté en pleine lumière : à propos de
l'ordonnance du 30 janvier 2009 », JCP N 2009. I. 1138, n° 8).
21. Dans le même sens, F. BARRIERE, « La fiducie : Commentaire de la loi n° 2007-211 du
19 février 2007 (II) », Bull. Joly 2007. 555, n° 22.
22. À propos des conséquences qui en découlent, infra, nos 304 et ss.
23. Quelques particularités de la fiducie française réduisent nécessairement les utilisations de ce
contrat à titre personnel. D'abord, le contrat de fiducie est nul s'il procède d'une intention libérale au
profit du bénéficiaire (C. civ., art. 2013), ce qui exclut son utilisation comme équivalent au trust le plus
plébiscité par les particuliers dans les pays anglo-saxons, le « family trust », qui permet d'organiser la
gestion du patrimoine familial et de protéger ses proches des aléas de la vie. Ensuite, les fiduciaires sont
nécessairement des professionnels (C. civ., art. 2015), qui sont donc rémunérés, et de nombreuses taxes
sont perçues à tous les stades de l'existence de ce contrat, ainsi que nous venons de le voir. L'utilisation
de la fiducie est donc fort coûteuse, ce qui restreint à nouveau son intérêt pour les particuliers.
Cf. d'ailleurs en ce sens, même en matière de sûreté, le coût de la fiducie étant plus important que celui
de l'hypothèque, Y.-M. RAVET et M. ANDREANI, « La fiducie : sûreté d'élite ou produit de
masse ? », Dr. et patr., sept. 2013, n° 228, p. 38.
24. Rapport n° 11 de H. de RICHEMONT, préc., p. 21.
25. C. WITZ, « La fiducie française face aux expériences étrangères et à la convention de La
Haye relative au trust », D. 2007. 1371.
26. C'est par exemple le cas de l'EUROMILLIONS, pourtant créé par la Française des jeux,
installé sous forme de trust au Royaume-Uni. C'est encore le cas d'ALSTOM, qui a utilisé le trust lors
de sa restructuration en 2003 ou de PEUGEOT SA, qui a eu recours à cet instrument en 1987 dans le

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