Grands Colloques - Droit et surnaturel - 129

DROIT, FÉTICHISME ET SORCELLERIE EN AFRIQUE

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graves infractions, comme le meurtre, la profanation de tombes, ou encore
la mutilation de cadavres63 ; et l'on ne peut ici passer sous silence la pratique
de l'anthropophagie, que certains adeptes considèrent comme une source de
superpuissance spirituelle64. Les meurtres rituels sont également observés
dans les sociétés traditionnelles de l'Afrique anglophone ; ils impliquaient
le sacrifice d'un être humain dont les organes devaient être utilisés pour
anéantir la nuisance d'un mauvais esprit65 ; on y recourait aussi de façon
aussi macabre pour accroître sa puissance ou sa fortune personnelle, surtout
si les organes étaient retirés du corps d'une victime vivante afin de capter
son énergie vitale66. Autant de faits qui tomberaient aujourd'hui sous
l'empire du droit pénal.
En dehors de ces incriminations portées par le droit commun, certains
États ont consacré un droit pénal spécial de la sorcellerie, permettant aux
juges de sanctionner de manière particulière - mais non sans difficulté - les
faits de sorcellerie.

2. L'infraction spécifique de sorcellerie
Dans ce domaine, « criminalité de type occidental et criminalité traditionnelle coexistent en s'opposant »67. Loin d'être totale, cette opposition se
manifeste au niveau des règles tant du fond que de la procédure. Il apparaît
donc indispensable d'envisager séparément la répression de l'infraction
spécifique de sorcellerie en droit pénal traditionnel et dans le droit pénal
moderne.

63. Cf. not., dans son étude consacrée à la République Centrafricaine : M. Raynal, Justice
traditionnelle, justice moderne : le devin, le juge, le sorcier, op. cit., p. 134, 138 et s. Sur
l'incrimination de la mutilation de cadavre, v. e.g. art. 61 du Code pénal du Congo-Kinshasa.
64. M. Raynal, op. cit., p. 142 et s., spéc. p. 148-149. L'auteur cite une décision rendue
par la Cour criminelle de Bangui (le 3 nov. 1975), condamnant quatre hommes à mort pour
assassinat et anthropophagie. V. e.g. art. 62 du Code pénal du Congo-Kinshasa pour une
illustration de cette incrimination.
65. H. Ludsin, "Cultural denial: what South Africa's treatment of witchcraft says for the
future of its customary Law", art. préc., p. 77.
66. V. H. Ludsin, loc. cit., observant : "Medecine murder is one method used to increase
one's fortune. It is the practice of killing someone seen as successful and using his or her
body parts in a medicine to bring power or luck to the killer. Horrifically, the participants
remove the organs and body parts from the victim while he or she is alive in order to keep
as much as possible of his/her vital energy ". En Afrique du sud, la jurisprudence refuse de
voir dans la croyance en la sorcellerie une circonstance atténuante pour un meurtre rituel :
S. v. Modisadife 1980 (3) SA 860, headnote (A) (cf. Idem, p. 96).
67. M. Raynal, op. cit., p. 13.
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