Grands Colloques - La paix, un possible objectif pour les juristes de droit des affaires ? - 239

DOMINIQUE VELARDOCCHIO

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ainsi permettre à l'entreprise assignée en contrefaçon par une entité non
exploitante de poursuivre l'exploitation d'un brevet indispensable à son
activité, moyennant une compensation plus juste que celle demandée sous
la menace. Pour le demandeur, cette solution écarte le droit d'interdire
l'exploitation et le remplace par une rémunération raisonnable. C'est
également en modérant la rémunération attendue qu'un usage paisible de
la propriété industrielle peut être privilégié.

B. Modérer la fonction de valorisation.
10. Cette stratégie de modération est issue de la pratique des organismes
de valorisation conciliant brevets et normes techniques29. La normalisation
des spécifications techniques est désormais intégrée au processus d'innovation. Elle facilite le commerce international et constitue un formidable
levier pour les entreprises propriétaires de technologies qui deviennent
des standards. Lorsque la norme utilise une solution brevetée30, l'accessibilité de tous à la norme est contrariée par le droit d'interdire. Le droit
de la concurrence est intervenu pour sanctionner la pratique abusive dite
« d'embuscade » consistant à dissimuler le brevet lors de l'élaboration de la
norme puis à exiger des prix de licences excessifs31. L'apaisement des conflits
vient ici aussi de la contractualisation du processus. Dans les secteurs où
l'interopérabilité repose de nombreuses normes32, les organismes de normalisation ont adopté un modèle de gestion des droits de propriété industrielle
29. F. Violet, « Normes et brevets : relations vertueuses vs relations dangereuses » in Les
nouveaux usages du brevet d'invention entre innovation et abus, p. 35, PUAM, 2014.
30. Une étude de la Commission européenne (Study on the interplay between standards
and Intellectual property rights, Final report, avr. 2011 : http://ec.europa.eu) a relevé que
peu de normes comprennent un très grand nombre de brevets, la majorité des normes ne
contenant qu'un petit nombre de brevets, voire aucun.
31. cf. la décision de la commission dans l'affaire Rambus, 9 déc. 2009, aff. COMP/38.636
note F. Violet précitée. En outre, la question de savoir dans quel contexte le titulaire d'un
brevet essentiel à une norme peut agir en contrefaçon sans abuser de sa position dominante suscite des difficultés d'appréciation cf. Comm. UE, déc., 29 avr. 2014, aff. AT.39985,
Motorola, JOUE n° C 344, 2 oct. 2014, constatant que Motorola, en exerçant une action
en cessation à l'encontre d'Apple sur la base d'un brevet essentiel, a abusé de sa position
dominante, compte tenu du contexte particulier dans lequel l'action en cessation a été
utilisée ; Comm. UE, déc., 29 avr. 2014, aff. AT.39939, Samsung, JOUE n° C 350, 4 oct.
2014 acceptant les engagements de Samsung de ne pas agir en contrefaçon en Europe sur
la base de ses brevets liés à une norme à l'encontre des licenciés qui adhèrent à un cadre
de concession de licences spécifique ; une question préjudicielle est actuellement pendante
devant la CJUE (Aff. C-170/13 Huawei technologies v ZTE) sur le point de savoir si le
titulaire d'un brevet essentiel à une norme qui s'est déclaré disposé à octroyer des licences
FRAND commet un abus de position dominante lorsqu'il introduit une action en cessation
à l'encontre d'un contrefacteur lui-même disposé à négocier.
32. C'est le cas du secteur des télécommunications.

http://ec.europa.eu

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