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LES CONTRADICTIONS FRANÇAISES SUR LE DROIT D'ASILE

infondée »54. Par ailleurs, pour aller plus vite, la CNDA voit la formation réduite
à un juge s'étendre à un nombre plus important de décisions. Or, on peut légitimement s'inquiéter de la progression du juge unique au sein de la CNDA. Juge
unique, juge inique ? Cela n'est pas systématique mais priver le demandeur d'une
collégialité pour rendre la justice plus rapidement est une régression dans le traitement juridictionnel des demandes d'asile. Les impressions doivent être partagées devant la juridiction de l'asile car comme l'écrit Gérard Noiriel, « dans le
monde des réfugiés aussi, la vérité sur l'asile émerge parfois de la parole du fou ».
Il y a une dimension psychologique dans la réception du récit d'un demandeur
d'asile, ce constat justifiant la présence de plusieurs personnes qui peuvent comparer leur perception du récit. La position française à l'égard des réfugiés ne correspond pas toujours à la réalité juridique qui devrait leur être appliquée. On peut
citer l'exemple de cette déclaration du Premier ministre Manuel Valls le 16 septembre 2015, à l'Assemblée nationale : « les migrants qui ne relèvent pas du statut
de réfugié [...] proviennent des Balkans - Albanie, Kosovo - de pays sûrs donc,
voisins de l'Union. Ils proviennent aussi d'Afrique de l'Ouest. Ces migrants
entrent, pour une très grande majorité, dans l'immigration irrégulière (...) ils
doivent retourner vers leur pays d'origine, dans le respect des personnes, mais
avec fermeté ». Une telle dichotomie revient à admettre la possibilité d'effectuer
en amont des demandes d'asile un tri entre les vrais et les faux réfugiés. De même,
Michel Foucher, géographe et diplomate, écrit qu'« il est indispensable de distinguer clairement les réfugiés des autres catégories de migrants. Un habitant du
Kosovo cherchant à rejoindre l'Allemagne par la Hongrie n'est pas un réfugié
mais un migrant économique. À l'inverse, un réfugié est une personne fuyant un
pays en guerre ouverte, comme la Syrie, et en route vers l'Allemagne par exemple,
où elle pourra bénéficier légitimement du droit d'asile politique »55. Affirmer, a
priori, que tel migrant n'est pas un vrai réfugié en raison de son pays d'origine
revient à ignorer la complexité du réel et des persécutions avancées par chaque
migrant. En outre, au 16 septembre 2015, le Kosovo n'était pas sur la liste des
pays d'origine sûrs, le ministre de l'Intérieur ayant demandé cette inscription au
conseil d'administration de l'OFPRA qui n'a pris cette décision que le 9 octobre
suivant. Le Premier ministre s'appuyait donc le 16 septembre sur une décision qui
n'avait pas encore été prise mais qui avait été actée compte tenu désormais de
l'européanisation de cette liste56. Les Kosovars qui ont formé, en 2014,
2 775 demandes d'asile et qui sont au deuxième rang des demandeurs d'asile pour
les neuf premiers mois de 2015, verront donc leur demande faire l'objet d'un
traitement accéléré, ce changement de régime juridique corroborant l'affirmation
selon laquelle ces migrants sont essentiellement en quête d'un emploi et non
54. CESEDA, art. L. 213-8-1, al. 2, qui précise les caractéristiques, depuis juillet 2015,
d'une telle demande formée à la frontière.
55. Le 1, n° 73, 9 sept. 2015, « L'accueil des réfugiés est un combat politique ».
56. CESEDA, art. L. 722-1 modifié afin de tenir compte de l'article 37 de la directive
2013/32/UE du 26 juin 2013 sur les procédures communes pour l'octroi et le retrait de la
protection internationale.

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