Grands Colloques - La protection du dirigeant social - 50

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LA JurISpruDeNCe AIMe-t-eLLe Le DIrIGeANt ?

chambre commerciale le 27 mai 2014 est particulièrement illustratif de cette
évolution47. en l'espèce, deux sociétés ayant un dirigeant commun faisaient
chacune l'objet d'une procédure collective, la société-mère étant placée en
redressement judiciaire et sa filiale en liquidation judiciaire. Le liquidateur
de cette dernière assigna son dirigeant en responsabilité civile personnelle
au motif qu'il n'avait pas déclaré au passif de la société-mère une créance de
compte courant d'associé de la filiale48. Condamné par les juges du fond, le
dirigeant voit son pourvoi rejeté par la Cour de cassation : il s'agissait bien
là d'une faute détachable. on relèvera que l'intérêt du groupe49, invoqué
par le dirigeant, n'a pas ici été retenu. Cela ne nous semble toutefois pas
surprenant dans la mesure où l'absence de déclaration au nom de la filiale
ne recevait aucune contrepartie50. Compte tenu des circonstances, il n'y a
pas lieu de s'émouvoir particulièrement de la condamnation du dirigeant.
Mais on ne peut manquer de relever une certaine mutation de la notion de
faute détachable.
20. Dans le sens de la rigueur, il convient encore de souligner que
si la Cour de cassation considère que les administrateurs ne sont pas
responsables des conséquences dommageables des décisions prises par
les assemblées générales d'actionnaires51, certaines décisions tendent à
faire peser sur le dirigeant les conséquences de décisions dont ils n'ont
pas, en principe, l'entière maîtrise52. Ainsi, une faute de gestion a pu être
reprochée au dirigeant social mettant en œuvre la décision des associés de
distribuer des dividendes dans un contexte difficile pour la société. Il faut
toutefois relever que le dirigeant en question était l'associé majoritaire de
l'une des sociétés associée de la société en liquidation judiciaire, si bien
qu'il maîtrisait, en amont, la prise de décision relative au versement des
dividendes53. on comprend donc la réaction jurisprudentielle face à ce type
de comportements, même s'il faut souligner qu'elle est parfois plus rétive à
aller au-delà des apparences quant aux prérogatives de chaque organe social.

47. Cass. com., 27 mai 2014 : n° 12-28.657 ; Bull. Joly Sociétés 2014, p. 467, note e. MouialBassilana. V. également, Cass. com., 24 juin 2014 : n° 13-50.050.
48. Le cumul avec l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif était ici possible dans
la mesure où les faits reprochés au dirigeant étaient postérieurs au jugement d'ouverture.
49. Sur l'incidence duquel, v. supra, n° 11 et s.
50. Comp. e. Mouial-Bassilana, note préc.
51. Cass. com., 4 mars 1986, Bull. Joly Sociétés 1986, p. 387.
52. V. not. S. Vicente, « Quelles responsabilités pour les dirigeants et les associés ? », Cah.
dr. entr., mars-avr. 2013, p. 52 et s., spéc. p. 53 et s.
53. V. également, CA Bordeaux, 2e ch. 23 avr. 2007, Dr. sociétés 2007, comm. 182, obs.
J. Monnet. en l'espèce, une faute de gestion était reprochée à un dirigeant, faute de gestion
relativement à la fixation de sa rémunération. La cour d'appel de Bordeaux a retenu une
telle faute de gestion alors même que la rémunération du dirigeant résultait d'une décision
de l'assemblée des associés.
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