Systèmes - La Cour de justice de l’Union européenne - 1re - 159

Les espaces d'échange durant le procès

concernant la procédure écrite et orale devant la Cour de justice précise que la langue de travail est le français. Cela implique concrètement que les documents internes sont produits en français et que
les juges rédigent rapports préalables, rapports d'audience, projets
de motifs, notes en délibéré et arrêts en langue française. Cette langue commune n'empêche pas des incursions dans d'autres langues
si nécessaire. Le président Lecourt se souvient par exemple que
« les juges se prêtent un efficace concours mutuel en quelque langue
que ce soit, pour une complète et loyale compréhension jusqu'en ses
nuances de la pensée de chacun »18. De même, ailleurs qu'au délibéré, le juge Puissochet rappelle qu'anglais, espagnol, italien, allemand, suédois sont des « langues de communication courante »19.
L'usage du français n'a pendant longtemps pas fait l'objet de
véritable remise en question, allant davantage de soi à l'origine de
la Cour. Quand les juges étaient au nombre de six, trois d'entre eux
parlaient le français et il n'y avait pas de problème pour trouver un
Italien, un Allemand ou un Néerlandais qui parlait français20. L'ancien président O. Due se souvient que « le travail en français s'est
révélé plus facile que prévu. Les juges de langue française aidaient
énormément les nouveaux »21. L'ancien juge Mancini trouvait que le
français est la bonne langue pour énoncer clairement un
raisonnement22 et l'ancien juge L. Sevon qu'elle n'était « pas seulement une langue riche et précise, mais [qu'elle permettait aussi]
d'inclure plusieurs phrases dans une phrase »23. D'autres, comme
O. Riese, premier juge allemand, montrait qu'il était difficile pour
un non natif de rédiger en français. Mais il trouvait qu'en définitive
les inconvénients (par exemple la version des arrêts traduite en allemand ne correspondait pas au style d'écriture en allemand) étaient
moins importants que les atouts24.

18.
19.
20.
21.
22.

R. LECOURT, « La Cour de justice... », op. cit., p. 270.
J.-P. PUISSOCHET, op. cit., p. 129.
Lord MC KENZIE STUART, op. cit., p. 122.
O. DUE, op. cit., p. 27.
F. MANCINI, « Crosscurrents and the tide at the European Court of Justice », Irish Journal of
European Law 1995, 2, p. 120, 121.
23. L. SEVON, « Languages in the Court of Justice of the European Communities », Scritti in
onore di G. F. Mancini, Dir. dell'Unione europea, Giuffrè ed., 1998, p. 933, 945.
24. O. RIESE, cité par L. STEVENS, « The principle of linguistic equality in judicial proceedings and
in the interpretation of plurilingual legal instruments: the regime linguistique in the Court
of Justice of the European Communities », Northwestern University Law Review 1967, nº 5,
p. 701, 714.

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