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CHOIX D'ARTICLES DE PIERRE MAYER

notamment le cas du critère de la nationalité de l'assujetti. Les critères exclus le
seraient aussi bien dans l'hypothèse où les États principalement concernés décideraient de ne pas taxer l'opération que dans l'hypothèse inverse : si un État
décide de ne pas utiliser une source de recettes à laquelle il pourrait légitimement
recourir, ce peut être pour des raisons sociales (non-imposition des revenus
faibles), économiques (absence d'impôt sur le bénéfice des entreprises récemment créées), ou autres, mais ce n'est en tout cas pas pour permettre à un autre
État de se substituer à lui.
Des considérations analogues limitent le droit pour les États de procéder à des
nationalisations. Le pouvoir de décision sur l'opportunité d'une nationalisation
appartient de façon exclusive à chaque État pour les nationalisations dont on
envisage qu'il soit le bénéficiaire : un État ne pourrait - hypothèse d'école - décider le transfert d'une entreprise quelconque à un autre État. Mais l'exercice de
cette compétence dans le sens de la nationalisation effective n'est possible que de
façon spatialement limitée. Prendre le contrôle d'une entreprise déterminée et
recueillir les fruits de son activité n'est évidemment possible que pour un seul
État ; il importe donc que ce soit celui dans la sphère économique duquel s'inscrit
l'entreprise ; la difficulté réside seulement dans la détermination des limites de la
sphère économique d'un État109.
98.  La compétence en matière de collation de la nationalité appelle des
remarques particulières. La nationalité intéresse le droit international public en
quelque sorte au second degré, dans la mesure où elle est elle-même un critère de
compétence internationale (par exemple en droit pénal), et dans la mesure aussi
où l'État peut exercer la protection diplomatique au profit de ses ressortissants. La
diversité des solutions nationales et la pluralité des critères de collation dans
chaque droit excluent l'existence d'une règle coutumière de droit international
public posant un critère unique, seul moyen d'assurer la possession par chaque
personne d'une seule nationalité. Mais l'arrêt Nottebohm (précité) a du moins
posé l'exigence d'un rattachement effectif de l'individu à l'État.
99. Les raisons mises en avant, dans les diverses matières de droit public, pour
restreindre la compétence normative des États, n'ont pas leur équivalent en droit
privé.
Sans doute pourrait-on faire valoir que la pluralité des compétences juridictionnelles est tout aussi gênante en droit privé qu'en droit public, car elle conduit,
soit à des jugements contradictoires, soit à la primauté de la position adoptée par
le premier tribunal saisi, qui n'est pas nécessairement le mieux placé - notamment s'il est seulement celui du lieu de situation des biens du défendeur.
Mais les deux hypothèses sont néanmoins bien distinctes.
En droit privé, il s'agirait d'interdire au tribunal, non pas de statuer dans un
sens déterminé, mais de statuer tout court, pour laisser juger un autre État ; ceci
n'aurait de sens que si l'on obligeait en même temps l'État incompétent à donner
109. V. P. Mayer, La distinction entre règles et décisions et le droit international privé, 1973,
p. 206 à 210.
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