Les Mélanges - Mélanges en l'honneur du professeur Didier R. Martin - 143

PHILIPPE BRIAND

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contrat à durée indéterminée9 dont la rupture sera tout naturellement soumise
aux exigences de préavis suffisant de l'article L. 442-6 du Code de commerce.

2. La reconduction pour un nombre indéfini de périodes
Les contractants peuvent être convenus que le contrat parvenu à son échéance
serait tacitement reconduit pour une durée déterminée, sans pour autant limiter
le nombre de reconductions. C'est sans doute la situation la plus courante. Le
contrat sera ainsi tacitement reconduit d'année en année ou de deux ans en deux
ans... C'est ce que l'on appelle un contrat « à périodes ». Si la jurisprudence a pu
paraître hésitante quant à la qualification de ce type de contrat10, il semble
aujourd'hui que de tels contrats, du moins lorsqu'ils sont conclus entre commerçants, ressortissent à la catégorie des contrats à durée déterminée11. C'est dans
cette hypothèse que prend tout son sens la distinction entre la notion de contrat
et celle de relation commerciale. Ici, la relation commerciale, constituée d'une
succession de contrats à durée déterminée reconductibles indéfiniment, est une
relation à terme incertain. L'incertitude de l'échéance de la relation (mais non du
contrat) justifie que le refus de reconduction soit soumis à l'exigence du préavis
défini à l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce.
Une telle soumission se heurte cependant à quelques difficultés pratiques.
Imaginons par exemple qu'un contrat d'approvisionnement dure depuis plus
de vingt ans et ce, à la faveur d'une reconduction tacite du contrat initial d'année
en année sauf dénonciation six mois avant le terme. Depuis peu, la relation commerciale s'est dégradée et le fournisseur entend y mettre fin alors qu'il se trouve à
un peu plus de six mois de l'échéance annuelle. L'ancienneté de la relation incline
à offrir au distributeur un délai de prévenance plus long que le délai contractuel.
Dans de semblables situations, il n'est pas rare que la durée jugée suffisante soit de
deux ans12. C'est alors que se présente une difficulté. Comment le fournisseur
9. Civ. 1re, 15 nov. 2005, Bull. I, n° 413 : « la tacite reconduction d'un contrat de durée
déterminée, dont le terme extinctif a produit ses effets, donne naissance à un nouveau contrat,
de durée indéterminée... ».
10. La troisième Chambre civile ayant admis qu'ils devaient être qualifiés de contrats à
durée indéterminée : Civ. 3e, 2 mars 1988, Bull. III, n° 50
11. Civ. 3e, 10 janv. 1990, Bull. III, n° 7 ; Civ. 3e, 24 nov. 2004, Bull. III, n° 210 ; Com.,
15 janv. 2008, Bull. IV, n° 4, ce dernier arrêt étant particulièrement explicite : « Mais attendu
que, hors les situations régies par une loi spéciale, un contrat conclu pour une période déterminée, et renouvelable ensuite d'année en année par tacite reconduction, sauf dénonciation
adressée par l'une des parties à l'autre, trois mois au moins avant la fin de la période annuelle
en cours, et qui s'est effectivement poursuivi au-delà de la période initialement convenue,
conserve le caractère de contrat à durée déterminée ».
12. On se réfère ici à la technique d'évaluation approximative simplifiée qui consiste à
appliquer un mois de préavis par année de relation et, par précaution, d'arrondir au semestre
supérieur. Pour des exemples de préavis de deux ans, v. Com., 7 oct. 2014, n° 13-19.692 ;
Com., 11 juin 2013, n° 12-22.229 ; CA Toulouse, 12 déc. 2012, JurisData n° 2012-030237 ;
CA Paris, 4 févr. 2010, JurisData n° 2010-001393 ; CA Paris, 3 déc. 2009, JurisData n° 2009021456. Il arrive, dans des situations extrêmes, qu'un délai de trois ans soit requis. Ainsi, pour
une relation commerciale de 44 années, CA Limoges, 18 févr. 2015, RG n° 13/01488.
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