Précis Domat - Droit international et européen de l'environnement - 3e - 303

LES CIRCONVOLUTIONS INTERNATIONALES

Plus exactement, la notion de précaution vue par l'OMC, comme on l'a
expliqué supra, n'est qu'une notion subordonnée, dont la mise en œuvre, que l'on
espère rarissime, ne peut bouleverser l'ordre établi des priorités6.
C'est ensuite une notion édulcorée : il faut apporter, de façon certaine, et selon la
logique interprétative de l'organe de règlement des différends de l'OMC, des preuves
scientifiques de l'existence d'un risque plus que des indices probants de l'existence
d'un doute7 ! La situation est, par ailleurs, d'autant plus bloquée que ces interprétations restrictives sont fondées sur des expertises (le Codex alimentarius8 dont
l'indépendance par rapport aux lobbies est contestée9 et alors que, surtout,
« l'incorporation du codex dans les sources de droit prises en compte par l'OMC »
n'a pas clairement été débattue ni adoptée démocratiquement10.
C'est tout un système de pensée qui est en œuvre, institutionnalisé, qui s'il n'exclut pas ouvertement les préoccupations d'environnement, en minore l'importance.
Mais il est vrai qu'il ne s'agit là que du reflet d'une pensée qui, sans être exactement une pensée unique, traverse toutes les écoles de doctrine en économie, ou
peu s'en faut.

§ 2.
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UNE ÉCONOMIE SANS PRINCIPES ?

Serait-ce que l'économie mondialisée, en tant que matière
d'étude et objet d'études, fonctionnerait sans principes ?
Comme le rappelle J.-C. Lefort dans son rapport sur « Les relations transatlantiques à l'épreuve de la mondialisation »11, « contrairement à une idée trop largement répandue, ce ne sont pas les États-Unis qui ont demandé la création de
l'OMC », et « Le renforcement du système multilatéral était demandé par les pays
autres que les États-Unis pour permettre d'établir des règles de droit équitables ».
Les intérêts des États-Unis ne les poussent pas automatiquement à épouser -
tout au moins sans contrat de mariage - l'OMC. Tout démontre au contraire que
la juridicisation partielle - et si partiale qu'elle soit - de la mondialisation économique - est et peut être rejetée par les USA. Sans parler du maintien de leurs législations extraterritoriales - « les États-Unis n'ont pas abrogé leurs législations

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6. Dans leur politique de protection sanitaire, les états « doivent tenir compte de l'objectif qui consiste à
réduire au minimum les effets négatifs sur le commerce ».
7. L'affaire du bœuf aux hormones est à cet égard symptomatique : la mesure européenne est considérée
comme n'étant pas « scientifiquement justifiée », l'évaluation du risque n'étant pas précise. S'il faut qu'un
risque soit évalué précisément pour qu'on prononce un moratoire ou tout au moins que l'on prenne - au
sens étymologique et quotidien du terme - des « précautions », l'on est plus en face d'un « principe de
précaution » mais d'un « principe de certitude » ! D.J. CALDWELL, WTO panel décision on EU-US beef
hormone dispute : preliminary analysis, Sierra Club, dact. sept. 1997.
8. Le Codex alimentatarius fixe des orientations non contraignantes sous l'égide de la FAO et
de L'OMS. Voir R. ROMI, « Le Codex alimentarius : entre ambivalence et ambiguïté », RJE 2-2001.
9. V. J.-C. LEFORT, op. cit. qui critique « l'omniprésence de l'industrie et du gouvernement américains
au sein des différentes commissions du Codex ».
10. Rapport d'information J.C. LEFORT, « Les relations transatlantiques à l'épreuve de la mondialisation », AN no 1386, 11 févr. 1999, p. 127.
11. Rapport d'information précité, p. 115.

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Troisième partie : Le droit des pollutions et nuisances

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