Contextes - La réception du droit du travail par les milieux professionnels et intellectuels - 101

NAISSANCE DE LA LÉGISLATION OUVRIèRE RÉPUBLICAINE

ii - LA DIFFICILE DÉLIMITATION DU PÉRIMÈTRE
D'INTERVENTION DE LA PUISSANCE PUBLIQUE
Au-delà de la diversité de leurs titres, les discours de rentrée portant
sur les dispositifs normatifs relatifs aux relations de travail expriment des
ambitions assez voisines : énoncer le contenu et commenter les dispositifs
des lois ouvrières, exposer les raisons ayant conduit à leur adoption, évaluer,
le cas échéant, leur portée et en analyser les conséquences éventuelles sur
la pratique judiciaire quotidienne. Les rédacteurs des discours de rentrée
proposent ainsi un certain nombre d'outils d'évaluation des lois ouvrières à
l'aulne desquels ils expriment leurs vues sur l'extension du domaine d'intervention de la puissance publique.

A. Les outils d'évaluation : des lois sociales aux ouvrières
En l'espace de dix ans, entre 1890 et 1900, la législation industrielle
- selon la dénomination académique -, constitue le cœur de pas moins de
quatre discours de rentrée, dont deux sont prononcés, en 1894 et 1900,
devant la Cour de cassation. Au cours de la même décennie, devant les
cours d'appel de province, quatre autres audiences solennelles, d'ambition
plus modeste, sont consacrées au commentaire de certains dispositifs plus
spécifiques relevant du même domaine.
Des quatre interventions qui prennent pour objet d'étude la législation industrielle dans son ensemble, les deux premières, datées de 1890
et 1894, et qui ont pour même auteur Louis Sarrut, affichent une ambition
d'ordre politique : il s'agit d'examiner les réalisations accomplies par la
IIIe République pour en établir le bilan. Elles sont respectivement intitulées,
L'œuvre législative de la Troisième République dans le domaine des questions
sociales et La législation ouvrière de la IIIe République. D'ambition d'apparence plus modeste, la troisième, prononcée en 1898 devant la cour de
Bordeaux, propose, sous le titre Étude sur les principes de la législation
du travail, de rechercher l'existence d'éventuels principes directeurs de la
législation édictée en la matière depuis la Révolution française : « N'est-ce
pas le premier devoir du magistrat chargé d'appliquer les lois, interroge
ainsi l'avocat général Plédy dans son propos liminaire, que de connaître
leur esprit et leur tendance ? »31. La dernière, datée de 1900 et qui porte
sur La législation sociale à la fin du xixe siècle, affiche un objectif d'ordre
historique et se propose plus simplement de retracer la genèse d'un
31. PLédy L, Étude sur les principes de la législation du travail. Discours prononcé à
l'audience solennelle de rentrée du 17 octobre 1898, G. Gounouilhou, p. 8.

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