Contextes - La réception du droit du travail par les milieux professionnels et intellectuels - 246

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LA RÉCEPTION DU DROIT DU TRAVAIL

enfants37, de l'ordonnance de 1945 sur les comités d'entreprise38 ou des lois
Auroux par exemple39. D'autres le sont moins ou pas : ainsi la loi de 1874
sur le travail des enfants et des filles mineures ou celle de 1917 sur la société
anonyme à participation ouvrière, toutes deux traitées dans ce colloque.
La première avait certes déjà fait l'objet d'observations précises de la part
de Michèle Bordeaux40 et de Vincent Viet41. Karen Fiorentino prolonge
ici l'analyse à partir d'une étude départementale sur la Côte-d'Or nourrie
d'abondantes archives conservées aux Archives départementales de ce
département. Alexis Mages s'intéresse quant à lui à une loi ignorée, sauf
peut-être par les historiens du droit commercial, mais qui mérite parfaitement d'être traitée dans un colloque sur l'histoire du droit du travail si
l'on admet qu'au début du xxe siècle, celui-ci est un droit de classe, pour
reprendre l'expression de Georges Scelle42, rassemblant l'ensemble des
dispositifs destinés à la classe ouvrière.
Dans les deux cas, leur application apparaît comme un échec. Pour
la loi de 1874, deux raisons principales peuvent être notées. D'une part,
la faiblesse des moyens de contrôle : il n'existe que quinze inspecteurs
divisionnaires à la création du système et les commissions ne fonctionnent
pas compte tenu de la proximité de leurs membres avec les industriels ou du
non-remboursement des frais de déplacement. D'autre part, la complicité
des parents à l'occupation illégale de leurs enfants en raison de l'importance
du salaire, même très faible, de ces derniers dans les budgets familiaux,
phénomène mis en évidence par toutes les grandes enquêtes ouvrières du
xixe siècle43.
L'échec de la loi de 1917 obéit à de tout autres causes, mais il en est une
principale, c'est l'absence d'obligation. En droit du travail, les dispositifs
volontaires sont rarement efficaces.
37. guin Y., « Au cœur du libéralisme : la loi du 22 mars 1841 relative au travail des enfants
employés dans les manufactures, usines ou ateliers », in Deux siècles de droit du travail,
op. cit., p. 29-43 ; deFaLvard H., « La dérive de l'institution libérale du travail à l'aune des
acteurs de la loi de 1841 », in Les acteurs de l'histoire du droit du travail, op. cit., p. 109-121.
38. « La naissance des comités d'entreprise, une révolution par la loi ? », Travail et emploi,
n° 63, 2/1995, p. 58-76.
39. Le goFF J. (dir.), Les lois Auroux, 25 ans après : 1982-2007 : où en est la démocratie
participative ?, Presses universitaires de Rennes, 2008 ; traCoL M., Changer le travail pour
changer la vie : genèse des lois Auroux (1981-1982), L'Harmattan, 2009.
40. « Nouvelle et périmée : la loi du 19 mai 1874 sur le travail des enfants et des filles
mineurs employés dans l'industrie », in Deux siècles de droit du travail, op. cit., p. 45-59.
41. viet v., Les voltigeurs de la République [...], op. cit.
42. sCeLLe G., Le droit ouvrier. Tableau de la législation française actuelle, Armand
Colin, 1922 (1re éd.).
43. Voir, par exemple, monFaLCon J. B., Histoire des insurrections de Lyon, en 1831
et 1834, d'après des documents authentiques ; précédée d'un essai sur les ouvriers et l'organisation de la fabrique, Louis Perrin, 1834.
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