Contextes - La réception du droit du travail par les milieux professionnels et intellectuels - 27

UNE ÉTAPE DANS LA RÉGLEMENTATION DU TRAVAIL

l'application de la loi de 1841, mais aussi de celle de toutes les lois industrielles, par des rapports que les sous-préfets sont tenus de lui faire parvenir
annuellement, et ce conformément à des instructions préfectorales du
25 juillet 186120. Dans les tableaux adressés au préfet de la Côte-d'Or par
les sous-préfets, on constate seulement que les tuileries sont les principales
industries à employer des enfants de huit à dix ans21, quoique cette limite
de huit ans soit bien tendre pour commencer le travail en usine22. La limite
horaire du travail serait respectée, un rapport du sous-préfet de Châtillonsur-Seine nous apprend que dans les usines métallurgiques, on ne fait
travailler que des enfants âgés de plus de treize ans. Le travail effectif y
serait de douze heures, divisées par des repos (sans plus de précisions quant
à la fréquence et la durée de ces derniers). Par contre, le sous-préfet ajoute
que presque toujours deux enfants sont appliqués à la même tâche, de sorte
que le travail réel n'est que de six heures. Il en conclut que « cette division
du travail est faite pour les enfants qui ont une occupation un peu rude
mais qui n'excède jamais leur force. En somme le travail des enfants est
bien plutôt un sacrifice fait par les chefs d'établissements pour venir en
aide aux familles de forgeron que le prix de services rendus »23. Là où
l'industriel ne peut pas être soupçonné de philanthropie c'est en matière
de travail de nuit. L'article 3 de la loi du 22 mars 1841 l'interdit aux enfants
de plus de treize ans et pour ceux ayant dépassé cet âge, il le permet à la
condition de compter deux heures pour trois24. Cette tolérance du travail
avoir lieu que de cinq heures du matin à neuf heures du soir. L'âge des enfants sera constaté
par un certificat délivré sur papier non timbré et sans frais, par l'officier de l'état civil ».
20. Lettre du sous-préfet de Châtillon-sur-Seine, première division secrétariat-exécution
de plusieurs lois relatives au régime industriel au préfet de la Côte-d'Or, le 8 janvier 1866,
ADCO, 10 M 12 Travail des enfants.
21. Tableau adressé au préfet de la Côte-d'Or par le sous-préfet de l'arrondissement
de Semur, le 25 juin1867 puis tableau dressé par le préfet de la Côte-d'Or permettant de
connaître les industries employant des enfants, ADCO, 10 M 12 Travail des enfants. Ce
dernier document nous apprend que, pour l'année 1867, dans tout le département (en
fonction des chiffres fournis) quatorze enfants de 8 à 10 ans travaillent, dont sept dans des
tuileries. Il y aurait au total 384 individus de moins de 16 ans qui travailleraient dans les
usines ou manufactures concernées par les dispositions de la loi de 1841.
22. « C'est dans le nord et l'est de la France que se trouve le plus grand nombre de
fabriques, et certes, si nos législateurs avaient vu dans quelle chétive position sont presque
tous les enfants de fabrique à l'âge de huit ans, comme ils sont petits, débiles, pâles et
maigres, ils auraient reculé jusqu'à dix ans l'époque de l'admission des enfants [sic] dans
les manufactures ; le nombre en est, du reste, peu considérable, et ils gagnent si peu, que
ce serait une bien faible perte d'argent pour les parents [sic] s'ils ne travaillaient pas, car la
plupart ont peut-être un franc par semaine », Thouvenin D., « De l'influence que l'industrie exerce sur la santé des populations dans les grands centres manufacturiers », Annales
d'hygiène publique et de médecine légale, 1847, série 1, n° 37, p. 98.
23. Lettre du sous-préfet de Châtillon-sur-Seine, op. cit.
24. « Tout travail, entre neuf heures du soir et cinq heures du matin, est considéré comme
travail de nuit. Tout travail de nuit est interdit pour les enfants au-dessous de treize ans. Si

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