Grands colloques - Droit public et droit privé de l'environnement : unité dans la diversité ? - 202

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LES TECHNIQUES

On notera également que l'article 1er du Premier protocole additionnel à la
Convention européenne de 1950, s'il consacre le droit de toute personne
physique ou morale (donc publique ou privée) au respect de ses biens,
reconnaît d'une part que sous certaines conditions, l'utilité publique peut
justifier sa suppression et d'autre part que les États peuvent réglementer
l'usage des biens « conformément à l'intérêt général » notamment. Or, il
se trouve que, selon des modalités très variables, l'environnement est, de
manière croissante, au nombre de ces incarnations d'un frein, d'un contrepoids susceptibles de justifier une atteinte au droit de propriété37. Voici
bien l'un des éléments centraux du changement de contexte, qui conduit à
envisager la protection de l'environnement comme ayant autant de valeur
que celle de la propriété ou des biens eux-mêmes. On pourrait synthétiser
ce qu'on vient d'évoquer de manière insistante en quelques lignes, et en
disant que l'intérêt général38, outil classique de relativisation des droits
portant sur des biens matériels, se charge actuellement d'une composante
environnementale qui a vocation à promouvoir l'encadrement « vertical »
(lisons : en dehors même de l'exigence de protection des droits d'autrui)
du droit des biens. Dans cette même veine, nous rapprochant de situations
concrètes, on devine ce qu'un tel déplacement des grands équilibres historiques pourrait avoir comme effets sur la technique du bilan, la déclaration
d'utilité publique susceptible de conduire à l'expropriation, etc. Il s'agirait
donc d'analyser, en particulier à partir de la jurisprudence, l'évolution de
la place prise par la protection de l'environnement dans sa confrontation
aux biens immobiliers dans le cadre des opérations d'expropriation, des
déclarations d'utilité publique et plus généralement lors du maniement
de la technique du bilan par le juge administratif. La relation pourra au
demeurant jouer dans deux sens différents, soit que l'intérêt environnemental d'un projet soit jugé à l'aune des inconvénients suscités pour le
droit de propriété et le bien foncier, soit que l'intérêt d'une opération se
heurte au caractère protecteur de l'environnement d'un bien immobilier,
en raison de sa situation géographique, de ses caractéristiques, de la faune
ou de la flore qu'il abrite, etc.
Parmi les autres outils classiques, dont l'intérêt général et ses déclinaisons
ne seraient qu'une figure, ne négligeons aucun de ceux que le droit de
l'environnement met en œuvre de manière explicite en vue de réduire
certains phénomènes de pollution ou d'assurer plus globalement la préservation d'un élément, d'un espace, d'une espèce : à n'en point douter, leurs
37. CEDH, 25 juin 2015, Couturon contre France, req. n° 24756/10, notamment § 29 et ss.
38. Autour de cette notion « environnante », celles d'ordre public écologique, d'utilité
publique, de nécessité publique gravitent ou se déploient, déclinant une donnée fondamentale, véritable instance de relativisation de la libre production, distribution et consommation
de biens matériels...
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