Grands colloques - Droit public et droit privé de l'environnement : unité dans la diversité ? - 29

LE PRINCIPE DE PRÉCAUTION

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l'environnement » et ceci alors même que ce dommage est « incertain
en l'état des connaissances scientifiques ». La méconnaissance de cette
obligation serait de nature à engager la responsabilité de tous ceux qui
s'aventurent sur des terrains scientifiques non balisés, mettent en œuvre
des recherches, développent des technologies nouvelles, etc., ainsi que des
autorités publiques qui ne leur interdisent pas de le faire.
Il faut souligner que c'est sur ce terrain que se sont surtout placés le droit
privé et le juge judiciaire (v. l'article de Laurent Neyret) dans cet ouvrage.
Ce qui a surtout soulevé l'inquiétude des milieux économiques et scientifiques est qu'une telle interprétation a été parfois formulée de manière
excessive et que cette interprétation maximaliste a donné au principe de
précaution une portée qui ne peut être la sienne. En particulier certaines
juridictions du fond ont été très loin en ce sens, par exemple, s'agissant
des doutes pouvant être nourris sur les effets produits par l'implantation
d'antennes-relais de téléphonie mobile et les rayonnements qui en émanent.
Le juge a été jusqu'à prendre en compte les préjudices résultant non pas
des ondes hypothétiquement émises mais de l'anxiété provoquée par
la seule présence de ces installations en se situant soit sur le terrain du
préjudice moral, voire même sur l'atteinte à la santé consécutive à cette
anxiété. Cela a conduit la cour d'appel de Versailles à juger dans un arrêt du
4 février 2009 (n° 08/08775), que « la cessation du préjudice moral résultant
de l'angoisse créée et subie du fait de l'installation sur la propriété voisine
de cette antenne-relais impose d'ordonner son démantèlement ».
On comprendrait l'inquiétude suscitée par la constitutionnalisation du
principe de précaution si, cette interprétation n'avait pas, par ailleurs, été
largement condamnée par le Tribunal des conflits qui, saisi par la Cour de
cassation, a tranché nettement dans un arrêt du 14 mai 2012, Brillaxis c/
Orange (AJDA 2012 1525, note Van Lang), en considérant que « le législateur a confié aux seules autorités publiques qu'il a désignées le soin de
déterminer et contrôler les conditions d'utilisation des fréquences ou bandes
de fréquences et les modalités d'implantation des stations radioélectriques
sur l'ensemble du territoire ainsi que les mesures de protection du public
contre les effets des ondes qu'elles émettent et contre les brouillages préjudiciables ; que, par suite, l'action portée devant le juge judiciaire, quel qu'en
soit le fondement, aux fins d'obtenir l'interruption de l'émission, l'interdiction de l'implantation, l'enlèvement ou le déplacement d'une station
radioélectrique régulièrement autorisée et implantée sur une propriété
privée ou sur le domaine public, au motif que son fonctionnement serait
susceptible de compromettre la santé des personnes vivant dans le voisinage
ou de provoquer des brouillages implique, en raison de son objet même,
une immixtion dans l'exercice de la police spéciale dévolue aux autorités
publiques compétentes en la matière ».
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