Grands colloques - Droit public et droit privé de l'environnement : unité dans la diversité ? - 31

LE PRINCIPE DE PRÉCAUTION

la question posée, qu'on s'interroge sur la probabilité de son existence
et son importance. La reconnaissance du principe de précaution a donc
logiquement conduit le législateur à préciser et à encadrer tant le processus
d'identification du risque, l'alerte, que celui de son évaluation étant précisé
que celle-ci peut conclure à l'inexistence de tout risque.

A. L'alerte
C'est sans doute l'organisation de cette phase initiale qui pose les
questions les plus complexes puisque, au départ, l'hypothèse du risque
n'a pas encore été soulevée.
Il s'agit donc de définir le moment où peut commencer le processus
d'identification d'un risque éventuel susceptible de justifier la mise en
œuvre de la démarche de précaution. Or, cette phase peut recouvrir des
réalités très différentes allant de l'expression d'un fantasme à l'exposition
motivée scientifiquement d'un doute en passant par la manœuvre malintentionnée destinée à faire naître le soupçon.
Cette question n'est pas spécifique au principe de précaution puisqu'elle
est d'abord apparue en droit du travail ou en droit sanitaire. Mais, compte
tenu de l'ampleur du risque potentiel, elle est centrale dans le domaine de
l'environnement et il n'est pas fortuit que ce soit dans le cadre du Grenelle
de l'environnement que soit née la législation française sur les lanceurs
d'alerte. La loi n° 2013-316 du 16 avril 2013 relative à l'indépendance de
l'expertise en matière de santé et d'environnement et à la protection des
lanceurs d'alerte s'est ainsi efforcée de définir l'alerte « protégée », l'étendue
du droit d'alerte en disposant que « toute personne physique ou morale a
le droit de rendre publique ou de diffuser de bonne foi une information
concernant un fait, une donnée ou une action, dès lors que la méconnaissance de ce fait, de cette donnée ou de cette action lui paraît faire peser un
risque grave sur la santé publique ou sur l'environnement ».
On voit l'intérêt que représente la reconnaissance et la définition de ce
droit en matière de protection juridique du lanceur d'alerte sur le terrain
du droit du travail, du droit pénal et de la responsabilité civile. En outre,
il faut se demander si la définition retenue de ce droit d'alerte n'est pas de
nature à faire peser sur les personnes concernées une obligation d'attention
conditionnant la mise en œuvre du principe de précaution. La réponse
n'est pas certaine mais le débat est ouvert sur la nécessité de compléter le
principe de précaution par un principe d'attention5.
5. Ainsi, en matière nucléaire, v. CE 17 oct. 2014, Comité de réflexion d'information et
de lutte anti-nucléaire, n° 361 315.

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