Grands colloques - Droit public et droit privé de l'environnement : unité dans la diversité ? - 36

LES PRINCIPES

Glisser ainsi, d'une démarche de précaution au respect d'un principe de
sobriété, reviendrait à neutraliser totalement la limite que constitue le « coût
économique acceptable ».

B. Un processus de décision spécifique
Si les mesures prises en application du principe de précaution s'analysent
bien comme des mesures de police, la spécificité du risque qu'elles sont
susceptibles de prévenir influe considérablement sur le processus selon
lequel s'exerce cette police.
1. Celui-ci se caractérise, tout d'abord, par la place qui y est faite à l'information et à la participation du public. Alors que, de manière classique, les
mesures de police administrative résultent d'un processus principalement
unilatéral et ne s'accompagnent, sauf exception, que d'une motivation a
minima, les mesures de précaution sont soumises à une obligation procédurale d'information et de participation du public.
On est tenté de considérer que ceci n'a rien d'original concernant les
polices de l'environnement. En effet, le principe est que toute décision
susceptible d'avoir des effets sur l'environnement est soumise, en application de la Charte constitutionnelle de l'environnement de 2005 - mais
aussi du droit de l'Union européenne - aux obligations d'information et
de participation inscrites à l'article 7 de la Charte.
En réalité, l'application du principe de participation aux mesures prises
sur le fondement du principe de précaution ne va pas de soi sauf à interpréter de manière extensive la notion de « décisions publiques ayant une
incidence sur l'environnement ». Les mesures de précaution n'ont d'incidence sur l'environnement que dans l'hypothèse où le risque existe et influe
sur l'environnement. L'article 5 de la Charte, pour sa part, est muet sur
les obligations d'information et de participation du public qui pèseraient
sur les autorités adoptant des mesures de police sur la base du principe de
précaution. C'est finalement le principe de transparence des évaluations
et des mesures de sauvegarde que pose le droit de l'Union européenne qui
semble le fondement le plus évident des procédures d'information et de
participation qui accompagnent les mesures de précaution.
2. L'incertitude scientifique qui pèse sur le risque envisagé influe
également de manière déterminante sur l'identification de l'autorité
compétente pour adopter les mesures de précaution. La Charte de l'environnement de 2005 ayant constitutionnalisé le principe de précaution et
le Conseil d'État ayant considéré qu'il était « applicable à toute autorité
publique », la question se posait de savoir si toutes les autorités pouvaient
l'invoquer dans l'exercice de leurs pouvoirs de police. Plus particulièrement

Grands colloques - Droit public et droit privé de l'environnement : unité dans la diversité ?

Table des matières de la publication Grands colloques - Droit public et droit privé de l'environnement : unité dans la diversité ?