Grands colloques - Droit public et droit privé de l'environnement : unité dans la diversité ? - 37

LE PRINCIPE DE PRÉCAUTION

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encore, les autorités locales pouvaient-elles se fonder sur le principe de
précaution dans la mise en œuvre de leurs pouvoirs de police générale ou
de police spéciale de l'urbanisme.
La réponse du Conseil d'État est sans ambiguïté : le principe de précaution
« ne saurait avoir ni pour objet ni pour effet de permettre à une autorité
publique d'excéder le champ de ses compétences et d'intervenir en dehors de
ses domaines d'attribution ». Il considère ainsi, à propos de l'implantation
des antennes-relais que « si les articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du CGCT
habilitent le maire à prendre les mesures de police générale nécessaires au bon
ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, celui-ci ne saurait
sans porter atteinte aux pouvoirs de police spéciale conférée aux autorités de
l'État adopter sur le territoire de la commune une réglementation portant
sur l'implantation des antennes-relais de téléphonie mobile et destinée à
protéger le public contre les effets des ondes émises par ces antennes »13. De
même, le Conseil d'État va juger, dans un arrêt du 24 septembre 201214
que l'autorité municipale « ne saurait en aucun cas s'immiscer » en vertu
de son pouvoir de police générale dans l'exercice de la police spéciale de
la dissémination des OGM.
Ce principe de l'exclusivité des polices spéciales de l'État s'explique
évidemment par la nature du risque qu'il s'agit de prévenir. L'existence
comme l'importance de ce risque dépendant d'évaluations scientifiques
complexes, la sécurité juridique exclut qu'on laisse aux autorités locales le
soin de les apprécier. Non seulement elles n'en ont pas les moyens, mais ceci
serait à l'origine de discriminations fondées davantage sur la manifestation
des opinions locales que sur des facteurs objectifs.
Il apparaît ainsi que le principe de précaution est, par essence, un principe
centralisateur. Il faut même se demander si l'État lui-même dispose d'un
total pouvoir d'appréciation pour mettre en place les mesures de précaution
et s'il n'est pas lié par les évaluations et les dispositions adoptées à l'échelon
de l'Union européenne. C'est en ce sens que semble pencher le Conseil
d'État en considérant que lorsque le principe de précaution est mis en
œuvre en droit de l'Union « le respect de l'interprétation donnée par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, garantit l'effectivité
du respect du principe de précaution énoncé à l'article 5 de la Charte » (CE
1er août 2013 ; n° 358 103). Ce qui revient à dire que les mesures de police
adoptées par l'État sont conditionnées par les interprétations adoptées en
droit de l'Union européenne.

13. Conseil d'État du 26 oct. 2011, Commune de Saint-Denis, req. N° 32649, AJDA 2011,
p. 2039 et 2219, chron. J.-H. Stahl et X. Domino.
14. CE Cne de Valence, AJDA 2012, p. 2122, note Untermaier.

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