Grands colloques - Droit public et droit privé de l'environnement : unité dans la diversité ? - 68

LES PRINCIPES

résulte de leur inscription (...) au compte du bénéficiaire », il demeure
qu'ils « sont négociables, transmissibles par virement de compte à compte
et confèrent des droits identiques à leurs détenteurs. Ils peuvent être cédés
dès leur délivrance... ». En outre, « les quotas d'émission peuvent être acquis,
détenus et cédés par tout exploitant d'une installation au titre de laquelle
a été délivrée par un État membre de la Communauté européenne une
autorisation d'émettre des gaz à effet de serre ». Autant d'éléments qui
caractérisent l'appropriation.
Reste que conclure que les quotas d'émission sont des biens et plus
généralement, analyser le marché des quotas d'émission sous l'angle du
droit des biens n'est pas totalement neutre au regard de la qualité de chose
commune de l'atmosphère, tel que cela résulte notamment de l'article 714
du Code civil. Bien entendu, il n'est pas question de déduire de la qualification de bien meuble incorporel des quotas d'émission de gaz à effet
de serre qu'il en résulterait une privatisation de l'atmosphère. L'objet de
propriété est le quota et non l'air. Mais, ainsi que le relève Thierry Revet,
en instituant un marché des quotas d'émission de gaz à effet de serre,
les pouvoirs publics se sont, de fait, reconnus le droit de déterminer la
composition de l'atmosphère. Et en distribuant ou en vendant des quotas
d'émission, c'est-à-dire en concluant des contrats qui in fine influent sur
la composition de cette atmosphère, se pose la question de savoir tout de
même si cela n'aboutit pas à reconnaître aux agents une emprise sur l'atmosphère (à défaut d'une exclusivité ou plus simplement d'une propriété) au
risque d'altérer son caractère de chose commune38.

2. Des outils concurrents ou complémentaires ?
Faute de pouvoir procéder à une comparaison de l'efficacité environnementale de chacun des deux instruments (taxe/permis d'émission)39, on
va s'efforcer, plus modestement, d'identifier certaines caractéristiques de
chacun d'entre eux - toujours dans le cadre du système juridique français
- afin d'en évaluer l'intérêt quant à l'objectif de réduction des émissions
de gaz à effet de serre.
Du point de vue de la mise en place de l'outil, la taxe obéit à une procédure
un peu plus lourde puisque le principe de la légalité des impositions implique
une compétence très large du Parlement. Pour les permis d'émission, le

38. T. Revet, préc.
39. Ne serait-ce que du fait de l'instauration très récente de la taxe. Plus fondamentalement, l'évaluation de l'efficacité respective des deux outils dépasse largement les dimensions
de cet article.

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