Grands colloques - Droit public et droit privé de l'environnement : unité dans la diversité ? - 83

LE PRINCIPE DE RESPONSABILITÉ

à l'ensemble des personnes ; qu'il résulte de ces dispositions que chacun est
tenu à une obligation de vigilance à l'égard des atteintes à l'environnement
qui pourraient résulter de son activité ; qu'il est loisible au législateur de
définir les conditions dans lesquelles une action en responsabilité peut être
engagée sur le fondement de la violation de cette obligation ; que, toutefois,
il ne saurait, dans l'exercice de cette compétence, restreindre le droit d'agir
en responsabilité dans des conditions qui en dénaturent la portée ».
L'article 4 de la Charte s'inscrit, en tout cas, dans une autre perspective
que ce dispositif relatif au dommage à autrui, pour consacrer le principe de
la réparation des dommages causés à l'environnement : l'utilisation du terme
générique « environnement » implique que devraient être concernés tous les
éléments de l'environnement, y compris ceux qui ne sont pas appropriés,
et ce, quand bien même l'atteinte qui les affecterait ne préjudicierait pas à
autrui. La Charte consacre donc implicitement la réparation du dommage
écologique, dans la mouvance de la directive n° 2004-35, dont l'un des
principes est la reconnaissance du dommage environnemental, admettant
ainsi un concept autonome couvrant les dommages « purement » écologiques et non plus seulement les atteintes à des personnes par le biais d'une
atteinte à l'environnement.
La formulation retenue par la Charte, qui met en avant la responsabilité de « toute personne », ne devrait pas fondamentalement changer la
jurisprudence constitutionnelle, qui a estimé que la responsabilité revêt
un caractère personnel, quelle que soit la personne concernée, physique
comme morale5. Cependant, le dispositif apparaît réducteur, puisqu'il
n'impose qu'une simple contribution : dans l'optique de la Charte, la
personne tenue de réparer peut n'apporter que sa quote-part. Elle doit
donc seulement concourir à la réparation d'un dommage dont elle serait
responsable - et dont éventuellement elle aura seule tiré les fruits -, sans
être nécessairement contrainte à la réparation intégrale qu'aurait supposée
la formule « Toute personne doit réparer les dommages à l'environnement
dont elle est responsable... etc. ». Ce dispositif peut toutefois être relativisé
par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, aux termes de laquelle
« nul ne saurait par une disposition générale de la loi être exonéré de toute
responsabilité personnelle, quelle que soit la nature ou la gravité de la faute
qui lui est imputée »6. Si, en certaines matières, « le législateur a institué des
régimes de réparation dérogeant partiellement à ce principe, notamment en
adjoignant ou en substituant à la responsabilité de l'auteur du dommage
la responsabilité ou la garantie d'une autre personne physique ou morale »,
5. Cons. const., 18 déc. 1998, déc. n° 98-404, « Loi de financement de la sécurité sociale
pour 1999 », D. 2000, somm. p. 63, obs. F. Mélin-Soucramanien.
6. Cons. const., 17 janv. 1989, déc. n° 88-248, loi modifiant la loi n° 86-1067 du 30 sept.
1986 relative à la liberté de communication, § 9 : RDP 1989, p. 429 s. obs. L. Favoreu.

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