Droit des affaires - Stratégie d'entreprise et propriété intellectuelle - 227

Stratégie fiscale et comptable et actifs intellectuels

219

l'ensemble des biens intellectuels, dans l'hypothèse d'une exploitation normale,
la valeur d'entrée en compte est différente de la valeur du bien après une première
période d'exploitation. Cette valeur, ensuite, suivra une courbe sinusoïdale. Le point
bas de la valeur ne sera certain que lorsque l'entreprise ne pourra plus en jouir seule,
soit parce qu'elle en a perdu la jouissance, soit que ledit bien est dévolu au domaine
public. Des cycles de valeur sont assez évidents pour les créations artistiques66, les
signes distinctifs67 et, dans une moindre mesure, pour les créations techniques. Le
temps des biens intellectuels est un temps fondé sur un référentiel long se mariant
parfaitement avec le concept d'immobilisation : les éléments destinés à servir de
façon durable à l'activité de l'entreprise.
322. La comptabilité cherche à rendre compte de l'atteinte corporelle du temps
sur la valeur des biens ; c'est une première limite à la logique du droit comptable
appliquée aux biens intellectuels. La perpétuité physique des biens intellectuels n'a
pas pour corollaire une valeur invariable ; celle-ci est contingentée par son environnement social dont chaque évolution influence la valeur des biens. Une création
obsolète ne connaît pas de perte de ses qualités physiques mais perd de son intérêt
économique. En comptabilité, la valeur des biens est vérifiée suivant une unité de
temps annuel ; seule une perte de valeur sur la période d'évaluation est transcrite.
La valeur des biens intellectuels s'apprécie avec des unités de temps allant de trois
à cinq années, et son évolution est sinusoïdale. Il faut parvenir à traduire dans le
premier langage, les réalités du second constat, afin de donner une image fidèle du
patrimoine d'une société en incluant le décalage existant entre les considérations
comptables et les spécificités des actifs intellectuels.
323. À l'asynchronisme du rythme, s'ajoute un décalage quant au mouvement
d'évolution de la valeur. L'évolution de la valeur comptable des actifs est à sens
unique : une dépréciation constante68. En conséquence de la règle de la valeur historique, la valeur d'activation est la valeur maximale d'un bien et celle-ci demeure
ou décroît par la suite. Or, la valeur des biens intellectuels est essentiellement
sinusoïdale. Cette évolution de la valeur ne doit pas être confondue avec les variations conjoncturelles qui n'ont pas à être transcrites par la comptabilité. La valeur
peut fortement croître avec le temps. Le bien peut avoir durablement, éventuellement

66. Par exemple : le catalogue des œuvres de Claude François ou de Charles Aznavour ; l'exploitation récurrente des catalogues de films des maisons de production, à l'image de Disney.
67. Voir la renaissance des marques comme Puma, Le Coq Sportif... Dans le même sens, le gain
de valeur de la marque Danone à partir du moment où le groupe du même nom a décidé de faire de ce
signe sa marque mondiale unique.
68. Par exemple, J. Lacombe, « Régularité et sincérité des comptes et image fidèle de l'entreprise :
la quadrature du cercle ? », Mélanges Roblot, LGDJ 1984, p. 311 et s.

Droit des affaires - Stratégie d'entreprise et propriété intellectuelle

Table des matières de la publication Droit des affaires - Stratégie d'entreprise et propriété intellectuelle