Manuels - Droits de l'homme et libertés fondamentales - 6e - 615

Les libertés de la presse, des communications et du spectacle

Est considéré comme une atteinte indirecte au secret des sources au sens
du troisième alinéa le fait de chercher à découvrir les sources d'un journaliste au moyen d'investigations portant sur toute personne qui, en
raison de ses relations habituelles avec un journaliste, peut détenir des
renseignements permettant d'identifier ces sources. » (art. 2 de la loi
modifiée de 1881).
À l'occasion des suites d'une affaire dite « des fadettes »43, la Cour de cassation a précisé sa conception de cette protection des sources des journalistes
dans un arrêt très important en énonçant : « il résulte que l'atteinte au secret
des sources des journalistes n'était pas justifiée par l'existence d'un impératif
prépondérant d'intérêt public et que la mesure n'était pas strictement nécessaire et proportionnée au but légitime poursuivi »44. Cette affaire et ses suites
ont fait s'interroger sur les insuffisances de la protection du secret des sources. Un projet de loi est donc en examen, depuis longtemps, au Parlement
pour affiner ce droit et le rendre plus en conformité avec les exigences de la
liberté de la presse dans une démocratie moderne45. Il semble s'inspirer du
modèle belge. Ce projet de loi a fait l'objet d'un examen approfondi par la
Commission nationale consultative des droits de l'homme, dans un avis
rendu le 24 avril 2013. Cet avis « expose la nécessité de préciser d'une
manière stricte la définition d'impératif prépondérant d'intérêt public - souvent invoqué au cours d'enquêtes judiciaires - afin de limiter les atteintes au
secret des sources. De même, la Commission préconise-t-elle que toute tentative d'identifier une source d'information, dans le cadre de l'exception légale,
soit au préalable autorisée par le juge des libertés et de la détention. La
CNCDH souhaite enfin que le journaliste soit exempté du délit de recel de
violation du secret des sources »46. Le président de la République a indiqué
lors de son discours pour le 70e anniversaire de l'Agence France Presse :
« Un projet de loi, attendu depuis trop longtemps, doit aussi renforcer la protection du secret des sources. Il sera discuté au Parlement cette année, je m'y
engage »47.
La loi no 2016-1524 du 14 novembre 2016 visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias a en effet complété utilement ce
dispositif pour protéger un peu plus les journalistes de pressions de toutes
natures : « Tout journaliste, au sens du 1º du I de l'article 2, a le droit de refuser toute pression, de refuser de divulguer ses sources et de refuser de signer
un article, une émission, une partie d'émission ou une contribution dont la
forme ou le contenu auraient été modifiés à son insu ou contre sa volonté. Il
43. En 2010, un procureur de la République, dans le cadre d'une enquête préliminaire, avait signé des
réquisitions permettant aux enquêteurs de saisir des factures détaillées des téléphones de journalistes
afin de connaître les sources d'information desdits journalistes. Cela concernait notamment des journalistes du Monde, dans le cadre de l'affaire touchant Liliane Bettencourt. Cela portait atteinte au principe du
secret des sources.
44. Cass. crim., 6 déc. 2011, M. Liliane X, no 1183970.
45. Adoption en première lecture à l'Assemblée nationale le 15 mai 2013.
46. www.cncdh.fr/fr/actualite/liberte-dexpression-renforcement-du-secret-des-sources-dinformation :
Franck Johannès, « Le secret des sources sera bientôt mieux protégé », Le Monde 25 mai 2013.
47. Discours du président de la République à l'occasion du 70e anniversaire de l'AFP, Palais Brongniart,
19 janv. 2015.

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