Hors collection - Lettres de François Gény à Raymond Saleilles - 154

LETTRES DE FRANÇOIS GÉNY À RAYMOND SALEILLES

revenu depuis huit jours déjà de Lorraine où je n'ai passé que deux semaines du
4 au 21 Septembre. D'après ce que vous me laissez entendre, il est probable que
vous n'étiez pas rentré à Gigny quand je suis passé devant Beaune le lundi 20 au
soir. En tout cas, je ne vous supposais pas revenus en Bourgogne, mais plutôt en
Morvan. J'ai donc manqué l'occasion que ce passage, survenu un peu plus tard,
m'aurait offerte. D'autre part, nous ne pensons pas regagner Dijon avant le 22
prochain. Et il me paraît tout à fait improbable que vous soyez encore à Gigny,
à cette date. Ce serait donc tout-à-fait manqué pour nous ! Je comprends bien,
qu'étant installés là-bas vous ne puissiez venir en corps jusqu'à nous. Même de
vous seul je n'oserais solliciter le dérangement d'un seul voyage. Si cependant, cela
n'était pas pour effrayer, je vous signale une combinaison qui ne vous séparerait pas
des vôtres pendant beaucoup plus de 24 heures. Elle consiste à partir de Beaune à
6 h 29 du soir pour arriver à 11 h ½ ici/10 h 50 à Derizy où vous ne seriez attendu
que par le cocher, qui a une habitude constante de semblables voyages et par moi,
sans déranger absolument personne autre. Vous auriez ici encore une nuit de repos
à peu près complète et pourriez nous rester toute la journée du lendemain, jusqu'au
train de 7 h 43 qui vous ramènerait à Beaune à 11 h 42. - Ce serait tout-à-fait gentil,
si vous pouviez ainsi dérober, à notre profit, un des derniers jours de vos vacances.
Ces trois mois auront été, pour nous, du calme absolu que je prévoyais au
début. Sauf l'événement du mois d'août, attendu et arrivé dans les conditions les
plus normales et les plus simples, sauf pour moi cette petite fugue de quinze jours
que j'ai pu consacrer à ma famille de Lorraine, ç'a été pour nous une période tout
intime et recueillie, presque trop recueillie même. Car les longs mauvais temps
ont empêché ma femme de profiter des bonnes dispositions, où elle était, de se
reprendre au grand air. Et c'est à peine si depuis quelque huit jours nous pouvons
un peu sortir et faire sortir notre petit homme. Depuis hier, voici le froid. Il faut
s'emmitoufler et ne pas craindre le vent qui souffle fort quand on quitte les bois.
Tout va bien, comme santé. Ma femme essaie ses forces chaque jour davantage et
avec succès. Elle se permet déjà les courses en voiture. Et j'espère que nous n'éprouverons aucun accroc à nous embarquer définitivement le 22 pour Dijon. - Notre
petite fille prospère sans excès assurément, mais d'une façon à peu près constante.
L'allaitement artificiel, beaucoup plus compliqué que l'autre, ne le vaut pas, comme
premiers résultats. Mais, nous n'avons pas à nous plaindre jusqu'ici, puisque cela
va, et même cela va bien, si l'on veut voir les choses non pas en mathématicien exact
et la balance à la main, mais avec les yeux du bon sens, de l'expérience courante,
et, pour tout dire, de l'évidence. J'espère que le changement de la rentrée s'opérera
sans drame, grâce aux ressources précieuses que nous assure maintenant la laitière
de M. Pierre Jolliet, et que l'effet d'un bon début à la campagne sera d'assurer
l'avenir.
À mon retour de Lorraine, je me suis remis à la seconde partie de mon travail
que j'avais attaqué au début des vacances. Maintenant, le gros œuvre en est bâti
(de cette 2e partie). Et je puis aller plus avant m'en achever les détails, comme
j'aurais voulu, faute de livres que je sens me manquer à chaque instant. Ce sera
pour occuper les loisirs du premier trimestre. Cette partie, où j'essaie d'attaquer

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