Hors collection - Lettres de François Gény à Raymond Saleilles - 209

1899

Vous avez vu sans doute le beau succès de la Conférence de Deslandres sur les
habitations à bon marché à Dijon5. Il y avait mis tout son cœur, en faisant une sorte
d'apostolat. L'impression produite a été forte. Et je ne doute pas que la divulgation
de ses idées n'entraîne assez de bonnes volontés, pour faire quelque chose.
Nous avons été moins sollicités que vous par les divers appels que suscite la
question du jour. Je crois, comme vous, que l'abstention est encore le parti le
plus sage au milieu de la confusion des idées et de l'équivoque des sentiments que
révèlent les groupements provoqués jusqu'à présent.
Mille remerciements encore pour toute la peine que vous avez prise à mon
intention. - Veuillez présenter mes respectueux hommages à Madame Saleilles
avec les meilleurs souvenirs de ma femme. Toutes nos tendresses à vos enfants.
Et pour vous, toute ma cordiale affection.
Fr. Gény

118 [Paris]
Dijon, 19 février 1899
Mon bien cher ami,
Excusez-moi de ne vous avoir pas encore répondu. Vous savez assez par
quelle absorption de pensée on passe dans certaines étapes de travaux mal définis
et touchant à tout, comme celui que je continue de bâcler sans relâche, et sans
pourtant avancer comme je l'espérais d'abord. Au travers de cela sont venus
les bouleversements, causés par les terrifiants accidents de ces derniers jours, à
l'impression desquels on n'échappe pas, quoiqu'on en ait, quand surtout derrière
les hommes qui disparaissent se dresse l'avenir, auquel ils manquent. - Pour ne
parler que de ce qui vous touche de plus près, la mort de votre doyen a causé une
émotion profonde dans le personnel âgé de notre faculté, où il comptait des amis
très intimes6. Vous aurez aperçu, sans doute, aujourd'hui à ses obsèques Gaudemet

5. M. Deslandres, Les habitations à bon marché à Dijon, 18 janvier 1899. Deslandres fut l'un des
fondateurs de la Société anonyme de crédit immobilier populaire de la Côte-d'Or à Dijon en 1912. Sur
la question du logement social dans la pensée de Deslandres, voir P. Bodineau, « Un juriste académicien
en lutte pour le progrès social : Maurice Deslandres », Akadémios, 2009, p. 79-87.
6. Nommé doyen de la faculté de droit de Paris en 1896, Jean-Baptiste Garsonnet (1841-1899) avait
été réélu à compter du 1er novembre 1899. Après avoir été agrégé à Douai en 1866, puis à Paris en
1870, il était devenu professeur de droit romain (AN. AJ16 1796, p. 191-192). Les circonstances de sa
mort étaient rapportées par le Journal des débats du 18 février 1899. Remarié depuis quelques jours,
il revenait d'un voyage de Bruxelles avec son épouse. Il décéda suite à une chute en gare de Feignies
(Sur l'hommage rendu par la faculté de Paris, voir AN. AJ16 1796, p. 419-425).

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