Hors collection - Lettres de François Gény à Raymond Saleilles - 6

LETTRES DE FRANÇOIS GÉNY À RAYMOND SALEILLES

Lors de cette visite, le professeur Okubo se fit remettre en qualité de dépositaire
par le docteur Bufnoir les lettres que Gény avaient adressées à Saleilles. Or c'est
de ces lettres et du sort qu'il convenait de leur réserver dont il voulait s'entretenir au cours du dîner. Quelle ne fut pas la surprise de son hôte qui découvrait
qu'il existait plusieurs centaines de lettres adressées durant deux décennies par
Gény à Saleilles et dans lesquelles, semble-t-il, tous les sujets étaient abordés, des
plus intimes et quotidiens aux plus intellectuels. Le professeur Okubo se désolait
néanmoins de ne pas avoir en sa possession les lettres envoyées par Saleilles à
Gény. Il avait échangé à leur sujet avec Bernard Gény, l'un des fils de François,
alors conseiller d'État. Celui-ci lui avait indiqué que ces lettres avaient disparu
dans des circonstances dont il s'engageait à lui donner le détail au cours d'un futur
entretien. Néanmoins, du contenu de cet entretien il n'est rien resté et nous ne
savons plus aujourd'hui quelles furent ces circonstances... Ne disposant que de
la moitié de la correspondance, mais aussi souffrant de ne pouvoir en apprécier
l'exacte portée du fait d'une écriture parfois difficilement lisible, il s'interrogeait sur
l'intérêt qu'il y avait à transcrire et publier ces lettres. Après une longue discussion,
il fut décidé que le professeur Okubo conserverait les lettres originales, mais qu'il
en adresserait des photocopies à son jeune collègue qui s'engageait à les transcrire
en vue d'une éventuelle publication. C'est ainsi que, rentré en France, ce dernier
commença à recevoir un premier lot de photocopies correspondant aux lettres de
1892 dont il retourna la transcription à son fournisseur qui lui envoya en retour
le lot de l'année suivante, et ainsi de suite jusqu'au terme de la correspondance.
Très rapidement, il apparut aux deux interlocuteurs que ces lettres ne devaient
pas rester confidentielles, tout à la fois en raison de leur intérêt scientifique toujours
actuel et parce qu'elles constituaient un témoignage unique sur la vie quotidienne
de deux professeurs des facultés de droit des années 1900. Le fait qu'elles n'émanent
que d'un seul n'était plus un obstacle à leur publication. Leur lecture permettait
en effet de dresser un portrait assez net des deux hommes, en plein pour Gény,
en creux pour Saleilles.
Néanmoins, le temps passa et la publication était toujours remise... Certes,
parce qu'elles avaient été à peu près correctement transcrites grâce à un travail
de véritable moine copieur, ces lettres furent utilisées par un petit nombre de
chercheurs qui s'en servirent pour leurs travaux, mais elles ne demeurèrent connues
que de quelques initiés. Près d'une décennie après leur transcription, le premier
des soussignés fut rejoint par ses deux collègues, les trois décidant de s'atteler
ensemble à la tâche pour livrer enfin ces lettres à un plus large public. C'est ainsi
qu'ils devaient pendant près de deux ans compléter la transcription originaire
qui comportait encore quelques trous, vérifier beaucoup de références et surtout
rédiger, grâce à la détermination du plus jeune des trois qui venait de soutenir
sa thèse de doctorat, un nombre important de notes propres à rendre ces lettres
compréhensibles par un public contemporain. C'est ce travail qui fait l'objet du
présent volume.
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