Systèmes - Lobbying et stratégies d'influences en France - 1re - 53

Le champ d'émergence économique et institutionnel

complexes et très distincts de comportement. C'était d'autre part le
maniement du haut personnel administratif et politique d'où dépendait
notre sort réglementaire et où il eut été bien peu réfléchi de penser que
le seul poids des arguments pouvait être décisif si des rapports
personnels noués avec souplesse, entretenus avec aisance et gentillesse
n'en facilitaient pas l'efficace application. »
Henri de Peyerimhoff, Souvenirs (1871-1953), Montpellier, s.d., cité par
A. Chatriot, « Réformer le social sous la Troisième République », Revue
d'histoire moderne et contemporaine, nº 56-4 bis, 2009, p. 51.

Ces activités occultes et douteuses, apanages des milieux
d'affaires, encore rattachées aujourd'hui, malgré les dénégations,
au répertoire d'action du lobbying, ont constitué un repoussoir pour
nombre de groupes d'intérêts qui s'en défient et s'en démarquent, à
commencer par les organisations syndicales du mouvement
ouvrier189. Il en va également ainsi pour ceux qui défendent des
intérêts socio culturels - religieux, linguistiques, ethniques, etc. -,
qu'ils soient liés à une sensibilité humanitaire - protection des
droits de l'homme, de l'enfance, des pauvres et des démunis, des
animaux, lutte contre les discriminations et pour le respect des
droits civiques, etc. -, à une expérience commune ou à une activité
partagée qui n'ont pas, à première vue, de caractère économique
ou professionnel (occupational groups) et semblent être, à leur
différence, désintéressés190. Défendant de justes causes, affichant
leur caractère non lucratif - non profit groups - et prétendant être
au service d'un véritable intérêt général et de toute la société, ces
groupes d'intérêts citoyens (citizen groups191) porteurs de valeurs
post-matérialistes et organisés autour d'enjeux sociaux, identitaires,
humanitaires, environnementaux ou religieux, qui interviennent de
plus en plus sur la scène publique depuis la fin des années 1960
n'entendent pas les compromettre en les promouvant par des
procédés susceptibles de les disqualifier. Pour procéder clairement
à ce démarcage, ils choisissent d'étiqueter sous le terme de
plaidoyer (advocacy issue) plutôt que sous celui de lobbying le
répertoire des actions irréprochables qui ne sauraient nuire à leur
189. R. BOURGUIGNON, M. RIVAL, « Le lobbying des organisations syndicales », Gestion et
management public, nº 1, 2012, p. 21-37.
190. Ce mouvement s'est développé aux États-Unis sous l'impulsion de l'avocat Ralph Nader
qui au début des années 1960 a lancé des campagnes de défense des consommateurs
avec l'association Public citizen : A. S MACFARLAND, Public Interest Lobbies, Washington,
American Entreprise Institute, 1976.
191. J. M. BERRY, Lobbying for the People, Princeton, Princeton University Press, 1977.

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