Grands Colloques - Le régime représentatif à l'épreuve de la justice constitutionnelle - 153

JULIE BENETTI

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de gardien du président de la République de celles qui se rapportent à sa
fonction d'arbitre ou même de « garant, suivant le second alinéa de l'article 5,
de l'indépendance nationale, de l'intégrité du territoire et du respect des
traités ». Surtout, si elle confie au chef de l'État la mission de la protéger, la
Constitution ne lui donne finalement que peu de prérogatives, propres ou
spécifiques, pour exercer son rôle de gardien.
On songe naturellement et prioritairement aux pouvoirs que détient le
président de la République vis-à-vis du Conseil constitutionnel, encore que,
dans ses relations avec le Conseil, en dehors du choix de son président, le
chef de l'État ne tire de son rôle de gardien de la Constitution ni plus ni
moins que les mêmes prérogatives que celles qui sont reconnues aux présidents des deux assemblées : nomination de trois des membres de l'institution
et droit de saisine afin de faire contrôler les lois et les traités. Mais, jusqu'à
la saisine du Conseil constitutionnel par François Hollande en juin 2015 sur
la loi relative au renseignement, aucun président de la République n'avait
encore usé de cette faculté pour le contrôle des lois. À l'inverse, et s'il a fallu
attendre 1976 pour qu'il fasse pour la première fois usage de cette prérogative12, le chef de l'État est devenu depuis l'autorité naturelle de saisine
du Conseil constitutionnel pour les traités puisque, sur les treize textes
internationaux déférés à ce jour au Conseil constitutionnel, dix l'ont été à
l'initiative du président de la République, dont deux sur la saisine conjointe
du Premier ministre sous la troisième cohabitation. Encore pourrait-on
considérer que le chef de l'État agit autant, sinon plus, ici, comme garant
du respect des traités que comme gardien de la Constitution.
Autre prérogative dont le président de la République peut faire usage en
sa qualité de gardien de la Constitution, mais celle-ci lui est particulière : la
demande de nouvelle délibération de la loi qui sursoit à sa promulgation
(article 10, alinéa 2). Encore ce dispositif, somme toute traditionnel en
régime parlementaire, existait-il déjà sous les IIIe et IVe Républiques13. Au
demeurant, cette faculté reste tributaire du contreseing ministériel et peut
être utilisée par le chef de l'État à une autre fin que la protection de la
Constitution : ainsi lorsque François Mitterrand, pour enterrer le projet,
demanda une nouvelle délibération de la loi sur l'Exposition universelle
de 1989, la France ayant finalement renoncé à présenter sa candidature à
l'organisation. En pratique, le bilan de l'article 10, alinéa 2, reste maigre avec
12. À propos de la décision des Communautés européennes relative à l'élection de
l'Assemblée au suffrage universel direct.
13. Voir respectivement l'article 7 de la loi du 16 juillet 1875 sur les rapports des pouvoirs
publics et l'article 36 de la Constitution du 27 octobre 1946.
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