Grands Colloques - Le régime représentatif à l'épreuve de la justice constitutionnelle - 316

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LE RÉGIME REPRÉSENTATIF

Le tirage au sort comme cela a pu être proposé naguère8 ? La nomination,
comme cela est le cas sous la Ve République ? Mais cette proposition en
faveur de l'élection est la conséquence de ce que Wanda Mastor regarde
comme un fait : le juge constitutionnel gouvernerait. Ce point ouvre deux
difficultés. La première, celle de la cohérence entre prérogative et légitimité,
est aisée à régler. Les deux entretiennent des rapports intimes ne serait-ce
qu'a contrario : un président dont la légitimité est forte grâce à l'élection au
suffrage universel et dont les prérogatives sont très limitées comme sous la
IIe République se sent à l'étroit dans des habits trop serrés. Le coup d'État
et le plébiscite de 1851 en sont des conséquences presque mécaniques. Un
président aux prérogatives importantes et à la légitimité faible, comme celui
de la IIIe République, éprouve quelques difficultés à les déployer. Donc,
si le juge constitutionnel participe au ou du gouvernement lato sensu, il
doit disposer d'une légitimité idoine pour cela. D'où la proposition de leur
élection. La seconde difficulté est celle de savoir s'il existe effectivement un
gouvernement des juges. Le débat est centré sur la question de l'initiative et
de la mise en mouvement de son pouvoir (le juge doit être saisi : il dépend
d'un autre) contre le pouvoir qu'il déploie dans ses décisions (le juge interprète librement la loi : il ne dépend que de lui-même). La question de savoir
si le fait d'être l'auteur de nouvelles normes en interprétant celles qui lui
sont soumises suffit à considérer qu'il « gouverne » - de gubernare, tenir
le gouvernail ou le timon du vaisseau étatique - reste un sujet à controverses. En tout état de cause, Wanda Mastor montre que l'élection des juges
comme prolongement logique de leur participation au pouvoir normatif au
motif d'une mise en cohérence entre puissance et légitimité est tout sauf une
question anecdotique. Par ce questionnement même, on fait connaissance
plus intimement avec ce nouveau messie du constitutionnalisme moderne.
Pour progresser dans la compréhension de la nature du juge constitutionnel à l'intérieur du régime représentatif, une autre voie consiste à
s'interroger sur la notion même de représentation. C'est celle qu'emprunte
Olivier Jouanjean9. Nombre de débats politiques et constitutionnels
allemands du XIXe siècle sont centrés sur cette question. Contrairement
au modèle français dans lequel on ne la conçoit que comme un mouvement
simple du représenté vers un représentant libre vis-à-vis de ses mandants,
les Allemands la regarde comme un mécanisme qui attache certes une
importance au mouvement ascendant (du représenté au représentant),
mais également au mouvement descendant (du représentant au représenté,
sous la forme pédagogique de la sollicitation de l'avis des citoyens dans
la décision publique et, partant, une prise de conscience de la difficulté de
8. Voir notre article, « L'ironie du sort », Revue de Droit d'Assas, Offre de droit : réformer
la composition du Conseil constitutionnel, n° 5, févr. 2012, p. 99 s.
9. « Constitutionnalisme, justice, justice constitutionnelle et représentation », supra.

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