Systèmes - La globalisation, le droit et l'État - 3e - 145

Le point de vue des régulations

internationalisation ? Successivement, les facteurs suivants, semble-t-il17 :
le développement des investissements américains en Europe après la
guerre, puis l'apparition du marché des eurodollars dans les années 1970,
l'entrée de la Grande-Bretagne dans la Communauté en 1973, et dans les
années 1980, la globalisation des marchés financiers.
Quoi qu'il en soit, le résultat est que les services juridiques connaissent
aujourd'hui un fort niveau d'internationalisation. Il y a quelques années, une
étude de l'OCDE a montré que la balance des services juridiques entre les
États-Unis et la Grande-Bretagne s'établissait autour de 2 milliards de
dollars18.
L'adaptation des professions juridiques à cette évolution s'est faite au
travers de la constitution de grandes firmes internationales, dans lesquels
figurent à la fois les principales sociétés d'audit (les « Big 8 » devenues
aujourd'hui « Big 4 » ; PriceWatherhouseCoopers, Deloitte & Touche...), qui
peuvent dans certains pays exercer des activités juridiques, et surtout les
grands cabinets de juristes, pour la plupart de souche anglaise ou américaine - Clifford Chance, Freshfields, Sherman & Sterling, etc.19. Ces derniers se sont développés surtout à partir de l'entrée de la Grande-Bretagne
dans le Marché commun, et des années 1980, avec la mondialisation des
marchés financiers : à partir de noyaux londoniens ou new-yorkais, ils ont
essaimé, avec des têtes de pont spécialement importantes à Paris, Francfort, Tokyo, Singapour, etc.20.
Ces firmes internationales ont acquis la maîtrise d'une grande part du
marché du droit des affaires. Pour le reste, elles sont dans une compétition
serrée - plus ou moins selon les pays21 - avec les firmes locales22.
Il est important d'ajouter que l'internationalisation des firmes ne signifie
pas que les systèmes nationaux se soient largement ouverts aux pratiques
transnationales - au sens de possibilité pour des praticiens relevant d'un
système donné d'opérer dans un autre système. Seule l'Union européenne
a développé sur ce point une réelle faculté pour les praticiens d'un État
donné d'exercer dans un autre État membre. Au niveau mondial, l'accord
OMC sur les services de 1995 devrait théoriquement permettre une ouverture, dont la percée n'est pas encore faite23. On comprend bien que les firmes juridiques peuvent devenir mondiales sans que les juristes qui les
17. Francis NEATE, "The Lawyer's Role in International Business Practice", in J. ROSS-HARPER
(ed.), Global Law in Practice, Kluwer Law International, 1997.
18. Peter GOLDSMITH, "Globalization of Laws. Tearing down the Walls", in J. ROSS-HARPER (ed.),
Global Law in Practice, précité, p. 139.
19. Henri NALLET, « Les réseaux pluridisciplinaires et les professions du droit », La Documentation française, 1999, p. 19 et s., 87 et s.
20. Francis NEATE, "The Lawyer's Role in International Business Practice", précité.
21. Sur la situation française, v. le rapport d'Henri NALLET, précité.
22. Jens DROLSHAMMER and Michael PFEIFER, The Internationalization of the Practice of Law, Kluwer Law International, 2001.
23. Tom ZWART, "The reflection of cross-border law practice in the organization and regulation
of the legal profession", précité.

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